La peur de l’homme

Un conte très noir de Pierre Notte autour du thème de l’inceste.

Gilles Costaz  • 20 janvier 2011 abonné·es

C’est un conte cruel. Mais les contes sont presque toujours cruels. Celui-là, Et l’enfant sur le loup de Pierre Notte , est plutôt un anti-conte de fées, dont le sujet terrible est traité, ou plutôt soigné, par l’humour le plus noir. Sous le regard d’un loup, bien meilleur que les hommes qui entrent en jeu – il a peur de l’homme, comme nous avons peur du loup –, un couple mène une vie morne et crapuleuse, en faisant commerce de l’odeur du sexe ! On va vite comprendre que l’inceste est l’occupation favorite du mari, qui abuse de sa fille dans la pièce d’à côté. De ces accouplements naît un fils qui perpétrera un autre crime, renouvelant l’infamie dont il est issu, la dénonçant et l’amplifiant en même temps dans un ­double acte sacrilège et vengeur.

C’est au carrefour du fait divers, de la mythologie et du cabaret scandaleux. Une partie du public peut rejeter violemment cette immoralité rieuse qui va jusqu’au bout de son rire truffé à l’effroi. Il y a là quelque chose d’un Ubu roi plongé dans la misère sexuelle. Si l’on veut bien entrer dans cette comédie allégrement glaçante, on apprécie l’écriture de plus en plus inventive de scène en scène, la mise en scène de Patrice Kerbrat qui trouve la juste tonalité de ce cirque insolent de la dérision, et les quatre acteurs, franchement splendides dans des rôles poisseux ou déchirés : Jean-Jacques Moreau, Judith Magre, Julien Alluguette et Pierre Notte lui-même.

Culture
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