Mélenchon soigne sa gauche

En annonçant qu’il souhaitait porter les couleurs du Front de gauche en 2012, le député européen a mis les formes pour ne pas froisser son allié.

Michel Soudais  • 27 janvier 2011 abonné·es

Et de quatre. Après l’annonce officielle de la candidature de Jean-Luc Mélenchon pour porter les couleurs du Front de gauche en 2012 – un front dont il souhaite l’élargissement –, suivie quelques heures plus tard par celle de Maxime Gremetz, député apparenté communiste, ce ne sont pas moins de quatre candidats qui ont répondu à l’appel à candidatures lancé par le conseil national du Parti communiste français (PCF) le 7 janvier ( Politis n° 1135). André Chassaigne, député communiste du Puy-de-Dôme, le premier, avait fait part de son « offre » de candidature dès la Fête de l’Humanité. Son collègue à l’Assemblée, André Gérin, ancien maire de Vénissieux (Rhône), s’est déclaré quant à lui le 12 janvier, avec l’objectif affiché d’empêcher que le PCF ne fasse le choix « mortifère » de présenter un candidat qui ne soit pas issu de ses rangs.

Avec ces quatre candidatures déclarées à ce jour, la désignation du candidat du Front de gauche s’apparente désormais à une miniprimaire. Ce qu’aucune de ses trois composantes ne voulait. Le Parti de gauche (PG) aurait souhaité que les trois formations qui le composent prennent leurs responsabilités en proposant un candidat commun, dont le nom aurait été soumis ensuite à leurs adhérents respectifs. Le processus de désignation décidé par le PCF n’a pas été celui-là. Quel que soit le nom que sa direction retiendra au lendemain des cantonales, les adhérents du PCF auront le dernier mot. Et pourront, puisque leurs statuts le permettent, se prononcer sur une ou plusieurs propositions alternatives.
Jean-Luc Mélenchon, conscient qu’il doit convaincre une base communiste dubitative, qui pourrait être tentée de se porter vers un candidat hostile au Front de gauche ou à sa candidature, s’est donc déclaré en y mettant les formes. Tout en indiquant vendredi dernier, sur BFM-TV, qu’il « souhaite être le candidat du Front de gauche » , le coprésident du PG a insisté sur le fait que sa candidature était une proposition mise en débat. Soumise d’abord à son parti et ensuite à ses partenaires : la Gauche unitaire, qui tient son congrès début février, et le PCF.

Sans surprise, le conseil national du PG, qui se réunissait samedi, l’a approuvé en adoptant, à l’unanimité moins trois abstentions, une résolution dont les termes ont été soigneusement pesés pour rassurer le PCF. Si la candidature de Jean-Luc Mélenchon y est « proposée » comme étant « celle qui exprime le mieux la dimension de rassemblement qui constitue la singularité du Front de gauche » , le texte souligne que « les élections législatives devraient voir désignée une majorité de candidats issus du PCF, qui, par son nombre de sortants et son ancrage sur le territoire, jouera un rôle clé dans cette élection qui constitue le rendez-vous démocratique essentiel à nos yeux, nous qui militons pour une VIe République parlementaire par la convocation d’une assemblée constituante » .

Le message adressé aux communistes est clair : une candidature Mélenchon ne fera pas disparaître le PCF, qui aura en retour le plus grand ­nombre de candidats aux législatives. 70 %, précise Jean-Luc Mélenchon dans l’Humanité , lundi. Autres propositions formulées dans cet entretien : que « le dispositif de campagne […] soit coordonné par un communiste » , et la campagne appuyée « sur des comités d’action par circonscription, […] menés par les candidats aux législatives ». Insistant sur le caractère collectif qu’il souhaite donner à sa campagne, le coprésident du PG a aussi fait savoir, samedi, qu’il ne voulait pas voir de pancartes avec son nom dessus et qu’il ne voulait pas entendre crier « Mélenchon président »  : « Si vous voulez crier, criez plutôt “Mélenchon présidons”. »

Toutes ces précautions permettront-elles d’éviter que le Front de gauche ne connaisse la même dispersion que les collectifs unitaires antilibéraux en 2007 ? Si la réponse des communistes ne viendra que mi-juin, le NPA a déjà fait savoir sèchement qu’il ne sera pas de ce rassemblement.

Politique
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