L’indispensable rêve de la citoyenneté universelle
Quand une association s’appelle Utopia, ses projets sont forcément ambitieux. Le 9 février, au forum social mondial de Dakar, elle a présenté son idée de citoyenneté universelle. Il s’agit de donner à chaque être humain la possibilité de circuler et de s’installer partout dans le monde, aussi facilement que les occidentaux peuvent déjà le faire. Un des outils pour cela est le passeport universel, une idée lancée par le gouvernement équatorien en 2008.
La crise mondiale actuelle est aussi une crise migratoire. Comme l’exprime un étudiant sénégalais : « Les occidentaux viennent sans problèmes passer des vacances chez nous tandis que les africains meurent en tentant d’atteindre l’Europe ! » Pression démographique, économique, persécutions, désastres écologiques… des millions de gens sont amenés à partir de chez eux. Sur la route, ils sont généralement dans une situation épouvantable, sans respect de leurs droits, tout entier tournés vers la survie.
L’équatorien François Soulard présente ce problème à sa façon : « Les critères régulateurs des migrations sont finalement un héritage des siècles passés. Nous sommes désormais comme un enfant trouvant son t-shirt trop petit. Notre monde a beaucoup grandi. Cela prendra peut-être du temps pour changer de chemise, de système régulateur, mais il faudra bien le faire. » Sous peine de rapidement voir notre monde tomber en lambeaux.
Mais la citoyenneté universelle est avant tout un outil, qui doit s’inscrire dans une volonté plus vaste, un programme de stabilité mondiale. Cinq axes prioritaires sont identifiés par Utopia : la liberté d’installation, la sécurité alimentaire, la reconnaissance du patrimoine écologique, l’accès inconditionnel aux biens communs et une nouvelle forme de démocratie. Utopia veut faire émettre le premier passeport en 2012. Il suffira de faire respecter les conventions internationales, de convaincre les gouvernements… « C’est fastoche, hein ? », ironise un intervenant.
Des citoyennetés régionales de plus en plus larges se construisent déjà partout dans le monde. L’Union Européenne est la plus connue, mais des progrès ont lieu aussi dans ce sens en Amérique latine et en Afrique. Le Cameroun et le Mali partagent même une nationalité unique depuis la décolonisation. « Les rassembler toutes est urgent, mais possible et nécessaire » affirme François Soulard.
Un projet fou ? Peut-être mais, comme le disait Nelson Mandela, cité deux fois au cours de la table ronde : « Les choses sont impossibles jusqu’au moment où nous les réalisons. »
Fabien Nicolas.
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