La leçon allemande

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Politis  • 31 mars 2011 abonné·es

C’est une magistrale correction que vient d’essuyer la chancelière Angela Merkel : le riche Land du Bade-Wurtemberg (sud-ouest), tenu depuis cinquante-huit ans par les démocrates-chrétiens de la CDU, devrait se doter d’un ministre-président écologiste, une première dans le pays. Lors du scrutin régional de dimanche dernier, les Grünen (25 %) et leurs alliés socio­démocrates du SPD (23,5 %) ont devancé la CDU (38 %). Dont le candidat, Stefan Mappus, est un chaud partisan de l’atome. On votait aussi en Rhénanie-Palatinat voisine : les écologistes y sont passés de 4,6 % à 15,3 %, et vont imposer un gouvernement de coalition au SPD, qui se maintient.
Si les conservateurs étaient en difficulté avant le tsunami japonais du 11 mars, la très vive réaction de la société allemande [^2] est venue démontrer à la chancelière allemande combien elle a joué avec le feu en revenant sur le programme d’une sortie du nucléaire à l’horizon 2020, adopté par la coalition SPD-Grünen en 2000. Fin 2010, elle faisait voter la prolongation de la durée de vie des centrales d’une douzaine d’années en moyenne.

Angela Merkel a certes promptement réagi après la catastrophe du Fukushima, en décidant la mise à l’arrêt temporaire de 7 des 17 réacteurs allemands, les plus âgés (dont deux dans le Bade-Wurtemberg), puis en annonçant un déploiement accéléré des énergies renouvelables. Peine perdue : l’opinion publique y a vu une piètre manœuvre électorale.
Même si le prurit allemand constitue un cas d’espèce, la prudence est affichée un peu partout en Europe. L’Italie, qui doit se prononcer par référendum en juin sur le retour du nucléaire après vingt-cinq ans d’abstinence post-Tchernobyl, a décidé un moratoire d’un an sur le projet – auquel 53 % des Italiens se disent désormais réfractaires. La Suisse a gelé les procédures d’autorisation de trois nouvelles centrales.

Vendredi 25 mars, lors d’un sommet européen, les Vingt-Sept ont accepté le principe de soumettre à l’automne les 143 réacteurs que compte l’Union à des tests de sûreté. Les recalés seront fermés, ont déclaré la France, l’Allemagne et l’Espagne (respectivement 58, 17 et 8 réacteurs). Tout l’enjeu portera sur les critères retenus, ainsi que la composition des équipes de test. Pour Nicolas Sarkozy, c’est tout vu : c’est l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) française qui mènera l’audit national. On prend les mêmes et on recommence ?

[^2]: Samedi, près de 250 000 Allemands ont manifesté leur sentiment antinucléaire dans les rues.

Politique
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