Persiste et signe
dans l’hebdo N° 1143 Acheter ce numéro
Au palais de justice, escalier F, troisième étage, Marc Trévidic exerce dans la galerie Saint-Éloi, réservée à l’antiterrorisme, dans un bureau occupé auparavant par Jean-Louis Bruguière, pape de l’antiterrorisme. Depuis le départ du surnommé « l’Amiral », Marc Trévidic a « hérité » notamment des dossiers de l’assassinat des moines de Tibéhirine, de l’attentat de la rue Copernic, de l’affaire Karachi, du génocide rwandais. Dossiers lourds s’il en est. Au cœur de l’antiterrorisme est son premier livre, dans lequel il se présente d’emblée en « acteur de deux tragédies à la fois : la tragédie terroriste et la tragédie du meurtre programmé des juges d’instruction » . Et, en effet, s’il évoque son parcours, depuis sa première affaire, en Bretagne, de l’explosion dans un McDonald’s ayant causé la mort d’une jeune femme, s’il donne quelques éléments biographiques, il raconte d’abord son métier (non sans pointes d’humour parfois), se faisant délibérément pédagogue, sur l’approche des dossiers,
ses face-à-face avec des terroristes,
sur les filières d’al-Qaïda, ses origines
et ses orchestrateurs.
Surtout, très présent dans la récente levée de boucliers du monde judiciaire, qualifiant Nicolas Sarkozy de « multirécidiviste à qui il serait temps d’appliquer la peine plancher » quand ce dernier attaque les magistrats, Marc Trévidic livre certaines coulisses de la justice. Sans fard et sans langue de bois.
Il dénonce « les luttes internes » , les allégeances et les plans de carrière, « les guerres de palais » , « les pressions, l’absence de soutien, le manque de moyens » , les aléas d’un poste « soumis
à la bonne volonté du pouvoir exécutif » ,
« la pollution du cours de la justice par les interventions du pouvoir politique » , les méfaits de la raison d’État, la difficulté à déclassifier certains documents dans les dossiers sensibles, tel que Karachi, militant enfin pour le maintien du juge d’instruction, seul garant de l’indépendance de la justice. Un témoignage brut.