Retraites, ça empire
Le Medef propose d’aligner les régimes complémentaires sur le système de base.
dans l’hebdo N° 1145 Acheter ce numéro
Le Medef vient de présenter aux syndicats un projet d’accord sur les retraites complémentaires. Celles-ci représentent une ressource importante pour les retraités actuels et futurs : environ 30 % des pensions des salariés affiliés à l’Arrco (17,5 millions d’actifs, 11,2 millions de retraités) et plus de la moitié des pensions de ceux affiliés à l’Agirc (3,7 millions de cadres en activité, 2,5 millions de retraités). Le Medef propose d’aligner les retraites complémentaires sur le régime de base. L’âge de départ pour l’ouverture des droits sera décalé de 60 à 62 ans, et de 65 à 67 ans pour obtenir une retraite à taux plein. Cela devrait permettre d’économiser 94 milliards d’euros d’ici à 2030, sur un déficit cumulé estimé à 117 milliards.
Un effort intégralement financé par les salariés, le Medef ayant exclu toute mise à contribution des entreprises. Des coupes de l’ordre d’une dizaine de milliards sont prévues dans les droits familiaux et conjugaux. Alors que la valeur du point des retraites complémentaires ne cesse d’être dévalorisée, le Medef propose une stabilisation des pensions pendant trois ans, jusqu’en 2015. Ensuite ? L’incertitude règne. Idem pour le système finançant les retraites complémentaires avant 67 ans (la cotisation AGFF), qui évite une décote trop importante des pensions. Le Medef, qui souhaitait s’en débarrasser, propose de reconduire cette cotisation jusqu’en 2018. Ensuite…
Deux syndicats, la CGT et la CFE-CGC, ont prévenu dès le 18 mars, date de l’ultime séance de négociation, qu’ils ne signeraient pas cet accord. Seule la CFDT a initialement jugé le texte « équilibré » . Pour être adopté, le projet d’accord doit recueillir la signature d’au moins un syndicat (la CFDT ?) et ne pas être contesté par trois autres organisations syndicales. La pression sera donc forte pour que FO et la CFTC demeurent neutres.
Le Medef n’a pas trop de craintes à se faire. En cas d’opposition, le gouvernement pourra prendre le relais et valider les termes de l’accord patronal. Il suivrait ainsi les recommandations de l’OCDE et du « pacte pour l’euro » validé par les chefs d’État et de gouvernement de la zone euro. L’OCDE a récemment appelé à « inciter les actifs à investir davantage dans les pensions privées » – la retraite par capitalisation –, citant en exemple le Royaume-Uni et l’Allemagne, à l’occasion de la publication de l’édition 2011 de son « Panorama des pensions » . Sans ressources nouvelles pour les régimes de retraite, les salariés seront donc invités à rejoindre ces dispositifs par capitalisation qui ont fait le malheur de millions de retraités nord-américains à la suite de la crise.