Ces islamistes qui s’installent

Denis Sieffert  • 16 juin 2011 abonné·es

Il faisait peur. On lui prédisait une vie politique éphémère. On disait son idéologie « islamiste » inconciliable avec la démocratie. Et pourtant, élection après élection, le Parti de la justice et du développement (AKP) du Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, renforce son influence. Il a remporté largement les élections législatives de dimanche en recueillant 49,9% des voix. Un troisième succès consécutif et le plus large depuis son arrivée au pouvoir en 2002. Avec 326 sièges (au lieu des 330 nécessaires pour disposer des deux tiers), l’AKP devra cependant composer avec l’opposition. « Le peuple nous a adressé le message que la nouvelle Constitution devra se faire par le compromis, la consultation et la négociation », a immédiatement déclaré M. Erdogan.


Il s’agit d’abolir la constitution imposée à la suite du coup d’état militaire de 1980. Derrière l’AKP, le Parti républicain du peuple (CHP) (centre-gauche) est arrivé en deuxième position, avec 25,9% des voix. Le parti pro-kurde BDP a également obtenu un succès spectaculaire, passant de 20 à 36 sièges. Les Kurdes sont entre 12 et 15 millions sur une population totale de 73 millions d’habitants.

Malgré un assaut de promesses démocratiques, M. Erdogan rencontre toujours le scepticisme de la presse d’opposition. Beaucoup craignent que le débat constitutionnel ne permette au Premier ministre de faire évoluer le pays vers un régime présidentiel taillé à sa mesure. Les opposants rappellent également que des dizaines de journalistes sont toujours en prison et que l’usage d’Internet est réduit. Une élection libre ne suffit pas à faire une démocratie au-dessus de tout reproche. M. Erdogan a par ailleurs marqué des points sur la scène internationale. La Turquie, qui accueille des réfugiés syriens, condamne sévèrement la répression en Syrie, et a pris ses distances avec Israël. Ce qui confère à Ankara une place stratégique dans la région.

Monde
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