Sunny Side, le docu en forme

À la Rochelle, la 22e édition de ce festival international du documentaire a démontré la richesse d’un genre que les chaînes ne négligent plus, bien au contraire.

Jean-Claude Renard  • 30 juin 2011 abonné·es

Cela se veut d’abord un marché international du documentaire. Des projections publiques ont réuni notamment Entre nos mains de Mariana Otero, le Dernier Train de Lixin Fan, et, en avant-première pour France Télévisions, Album(s) d’Auschwitz, de William Karel et Blanche Finger, ou encore le Peuple des océans, de Jacques Perrin et Jacques Cluzaud. Mais à côté des exposants, des producteurs, des diffuseurs, pour beaucoup étrangers, et non sans raison si l’on observe que le documentaire fait son trou dans les pays émergents, le Sunny Side of The Doc a été l’occasion pour les grandes chaînes de défendre leur politique éditoriale et de présenter leur rentrée. Sans tendance bien repérable, puisque chaque chaîne a multiplié les cases et déployé son éclectisme.


À Canal + d’ouvrir le bal de la rentrée. Avec un budget documentaire en 2010 de 11 millions d’euros passé à 14 millions d’euros. Au programme: Hors-jeu, la coupe du monde des sans-abri, disputée en août à Paris, film signé Jérôme Mignard ; Paris-Clichy/Paris-clichés, de Bruno-Victor Pujebet, un retour sur la ville cinq ans après les émeutes ; Un moment dans la vie de Hank Skinner, détenu toujours enfermé dans les couloirs de la mort du Texas, de Jordan Feldman ; les Adaptations au cinéma, ­d’Olivier Boucreux, où comment la littérature sert de matière ­première à la pellicule ; Outrage, de Kirby Dick, relatant l’homosexualité assumée ou niée des politiques aux États-Unis ; enfin une anthologie joyeuse des moments les plus comiques du cinéma X, regorgeant de trésors d’humour, Le sexe qui rit, d’Olivier Ghis.
Filiale de Canal +, Planète met en avant Massoud, le lion du Panjshir, de Jean-François Giré et Patrick Deschamps, une autre manière de commémorer le 11 Septembre, avec des images inédites de Massoud tournées par Christophe de Ponfilly.


Tandis que Rémy Pflimlin négocie le prochain contrat d’objectifs et de moyens, et tandis que le groupe fait appel à Boris Razon, venu du monde.fr, pour développer le web documentaire, France Télévisions s’est d’emblée montrée fière de ses 6 750 heures de docs en 2010 (avec un budget de 85,3 millions d’euros). Côté grilles, France 3 présente une nouvelle case documentaire, en deuxième partie de soirée (Frédéric Taddeï ayant sauté, c’est bien le moins), et France 4 proposera une autre case docu en prime time.


Côté programmes, France 2 annonce la Tragédie algérienne, de Benjamin Stora et Gabriel Le Bomin, cinquante ans après les accords d’Évian ; Discriminations, de Christophe Nick et Andrew Bampfield, autour de l’exclusion ; la Tête de l’emploi, de Didier Cros, sur l’entretien d’embauche et ses volets pervers ; Du mauvais côté de la loi, de François Chilowicz, une réflexion sur le rôle de la ­prison (y entrer, y être, en sortir). Sur France 3, on attend le Diable de la République, d’Emmanuel Blanchard, quarante ans de Front national, et sur France 4, À l’école du foot africain, de Jean-Thomas Ceccaldi, en quatre parties concentrées sur le Sénégal. 
Sur France 5: les Fins de droit, de Philippe Pichon  et Noirs de France, de Pascal Blanchard et Juan Gelas, une histoire des migrations.


Dernière-née dans le paysage de France Télévisions, France Ô entend s’inviter dans la cour des grands. Des documentaires, là encore, tels les Enfants prêcheurs, de Roberto Lugones ou Mai 1967, un massacre oublié, celui des ouvriers à Pointe-à-Pitre, de Xavier-Marie Bonnot, mais aussi une nouvelle programmation, sur laquelle on reviendra, avec des soirées événementielles, des rendez-vous d’information et la campagne présidentielle traitée sous l’angle exclusif des Affaires étrangères.


Le meilleur pour la fin : Arte. Sans bouleversement ni spectacularisation (avec un budget annuel de 70 millions d’euros), la chaîne européenne maintient son niveau d’exigence. Parmi les films les plus attendus, Mediator, histoire d’une dérive, de Bernard Nicolas ; Syrie, le monde selon Bachar, de Christophe Ayad et Vincent de Cointet, ou l’itinéraire d’un dictateur ; L. A. le gang des femmes, de Stéphanie Lamorré, portrait de quatre femmes plongées dans la violence urbaine ; Ikéa, nos vies heureuses, de Juliette Senik, autour de la mondialisation vu sous l’angle de l’entreprise suédoise ; Agnès de ci de là Varda, série documentaire ludique de la cinéaste (5×43’) ; ou encore les Combattants de l’ombre, de Bernard George, autre série documentaire (6×52’) sur la Résistance.


Non moins excitant, une histoire des Brigades rouges, de Mosco Boucault. Un programme foisonnant et rigoureux. Au diapason d’une curiosité, dont la chaîne négocie l’acquisition : les Infiltrés, de Khaled Jarrar, ou les 1001 façons de traverser le mur, tourné à Ramallah : soit vingt histoires de trois minutes, époustouflantes.

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