Démondialisation, trois débats nécessaires
La Fondation Copernic et Attac organisent le 19 novembre une journée d’étude sur le thème «Démondialisation/altermondialisation».
dans l’hebdo N° 1176 Acheter ce numéro
Sur fond de crise systémique du capitalisme néolibéral, le thème de la démondialisation a fait son apparition dans le débat public. Cette notion suscite la controverse. Il ne s’agit pas ici de faire référence aux partisans de l’ordre établi qui, assez logiquement, condamnent une démondialisation vue comme une démarche visant à sortir du cadre néolibéral. Les mêmes, d’ailleurs, emploient des arguments similaires à l’encontre du mouvement altermondialiste. Il s’agit du débat qui s’est instauré dans la « gauche de transformation sociale » et dans les mouvements sociaux.
Il porte d’abord sur l’analyse de la mondialisation. Pour les altermondialistes, elle a un contenu précis. C’est le processus qui vise à marchandiser la vie sociale, la vie elle-même jusqu’à la biosphère. C’est la mondialisation de la domination de la logique actionnariale sur les salariés et celle de la finance sur les processus productifs, et plus globalement sur les sociétés. Ces aspects forment un tout. Il s’agit d’une mondialisation organisée au service des firmes transnationales et des grandes puissances. C’est pourquoi les altermondialistes ne parlent pas simplement de « mondialisation » mais de « mondialisation néolibérale » pour caractériser le régime mis en place depuis une trentaine d’années. La démondialisation vise-t-elle alors la mondialisation en général ou la mondialisation néolibérale ?
Ce premier débat n’est pas simplement d’ordre terminologique. Derrière la terminologie, se cache une question fondamentale : quel processus est à la racine du néolibéralisme ? C’est la dynamique du capitalisme actionnarial, dont le moteur est « la création de valeur pour l’actionnaire », qui pousse les entreprises à délocaliser, à réduire la part salariale et à fragmenter les processus productifs. La mise en œuvre de mesures protectionnistes aux frontières, au-delà même de la discussion sur leur efficacité, est-elle à même de contrer cela ou faut-il s’attaquer à la logique même du capitalisme actionnarial ? Il s’agit donc d’un débat sur les objectifs du combat à mener.
Le deuxième débat est dans le prolongement du précédent. Pour un certain nombre de ses partisans, la démondialisation revient à faire de l’État-nation le seul cadre de démocratie possible. Il s’agit pour eux de protéger cet espace national contre d’autres pays jugés trop compétitifs, la Chine, mais aussi l’Allemagne, par exemple. Peut-on ainsi laisser de côté le rôle du capitalisme français dans la mondialisation néolibérale et oublier les limites de la souveraineté populaire dans le cadre national ?
Altermondialistes et démondialistes sont d’accord pour relocaliser les systèmes productifs afin de produire au plus près des lieux de consommation et réduire les flux de marchandises et de capitaux. Mais une réponse progressiste peut-elle se limiter à cela ? Ne faudrait-il pas plus de mondialisation dans des domaines comme, par exemple, les droits sociaux, les savoirs, la lutte contre le réchauffement climatique, la gestion des ressources rares, la taxation des transactions financières ? La démondialisation peut-elle être un processus général comme cette notion semble le suggérer ? C’est l’objet du troisième débat.