Impertinent Giesbert !
dans l’hebdo N° 1181 Acheter ce numéro
L’autre jour, donc, peu de temps après que François Fillon et divers autres humanistes régimaires avaient publiquement douté que « madame Joly » fût assez française pour briguer cheux nous un mandat présidentiel, Patrick Besson, collaborateur à le Point, a contrefait dans une chronique l’accent d’Eva Joly – lui faisant dire, notamment, « zalut la Vranze », au lieu de : « *Salut la Franc[^2]]] ».
Le directeur du Point, Franz-Olivier « Slurp » Giesbert, a trouvé ça désopilant[^3]. Eva Joly moins : elle a trouvé que la prose
besso(g)neuse sentait fort la « xénophobie salonarde » , et elle s’est même permis – suprême effronterie – d’exprimer (librement) ce point de vue.
Résultat, Giesbert a d’un seul coup perdu son humour, et s’est mis à hurler, comme fait toujours l’éditocratie quand on ose émettre des avis trop différents des siens, qu’on pouvait décidément p’us r’en dire dans c’pays, mâme Dupont, et qu’il en avait sérieusement ras le brushing de la « dictature du politiquement correct » et de la « maréchaussée de la bien-pensance » , avec ses « nouveaux commissaires politiques » qu’empêchent tout le monde de rigoler (merde alors, on pouvait déjà p’us « caricaturer Mahomet » , et voilà qu’on peut p’us non p’us se foutre de la gueule de la Norféchienne sans se faire traiter de racisse par la-police-de-la-pensée-de-la-tyrannie-du-bien-pensisme), et j’vais vous dire, mâme Dupont : on a vraiment un graaave problème de « liberté d’expression » dans ce pays – mais moi, j’vous l’annonce, je me laisserai pas faire, oooh non, putain, et nous, à le Point, on continuera d’être « insolents, potaches, ironiques ou impertinents » , et « on se gardera le droit » , dût-ce nous exposer à de gigantesques périls, « de sourire de tout et de tous, à commencer par nous-mêmes et les puissants » .
Et là aussi, t’auras compris : c’était de l’humour, puisque dans la vraie vie Giesbert est le gars chez qui fut, par exemple, très sérieusement théorisé en 2007, par un chantage au racisme d’une rare crudité, que si t’avais pas voté pour Sarkozy t’étais un peu antisémite – et puisque Giesbert himself a des fois mis tant de détermination à lécher le cul de Sarkozy, que l’autre en eut le fond du froc trempé de salive.
Je vais te dire : la prochaine fois que l’impertinent Giesbert voudra te dispenser une leçon de liberté d’expression, t’as qu’à lui rappeler que sa journaliste Catherine Pégard, qui suivait naguère la droite à le Point , fut récompensée de son intransigeante (mais potache) insolence par un poste de conseillère du président Sarkozy – je suis sûr qu’il va trouver ça follement drôle.
[^2]: Il y avait quelques précédents à ce divertissant exercice. Peu de jours auparavant, le fameux comique Pen avait, par exemple, fait la même chose, en déclarant : « Matame Choly est une vranco-norfégienne », et déjà Giesbert s’était (suppose-t-on) esclaffé.
[^3]: Mais il est vrai que nous parlons ici d’un gars qui regarde Nicolas Bedos comme un parangon de la subversion par le rire…
Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.