À flux détendu
dans l’hebdo N° 1193 Acheter ce numéro
Dans le flot continu des livres qui sont envoyés par les maisons d’édition au journal, les pépites parfois se révèlent à l’œil nu. Dans ce cas, point n’est besoin de se plonger dans de longues heures de lecture, ces œuvres puissantes s’offrent à vous en un clin d’œil racoleur. Ainsi l’ouvrage d’un certain Laurent Gaildraud. Impossible de ne pas s’y arrêter. Moins pour son titre – Orchestrer la rumeur – que pour les deux lignes de présentation au bas de la couverture : « Rival, concurrent, ennemi… comment s’en débarrasser ! »
Diantre ! N’est-ce pas le livre tant espéré donnant enfin le mode d’emploi pour venir à bout de son horrible belle-mère, de son obséquieux collègue de bureau, du bellâtre qui a séduit la plus belle fille du quartier, du type qui a fait injustement fortune ? Et cela sans verser la moindre goutte de sang : seulement en lançant ces boules puantes que sont les rumeurs, capables de détruire un individu, quel qu’il soit.
Peut-on avoir confiance dans les recommandations faites par Orchestrer la rumeur ? Et comment ! Son auteur n’est-il pas « fondateur du trophée Sun-Tzu qui récompense chaque année la meilleure rumeur orchestrée dans le contexte d’une OPA hostile » ?
Et son préfacier, Christian Harbulot, le directeur de l’École de guerre économique (et ex-membre de la Gauche prolétarienne) ? Ça sent son professionnel. Des hommes d’honneur et de morale qui tuent sans jamais avoir les mains moites. Lisons la prose de Gailbraud : « Ce livre s’adresse à toute personne qui souhaite orchestrer une rumeur dans le but de gagner de l’argent, de déstabiliser un concurrent, de faire ce qu’il a à faire. Si vous avez un adversaire ou un ennemi, vous êtes concerné. C’est dire si on ratisse large ! » Orchestrer la rumeur est publié aux éditions Eyrolles. Nous, on dit ça, mais ça doit être une rumeur : les éditions Eyrolles font paraître des livres qui puent.
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