Eva Joly et José Bové tiennent salon (de l’agriculture)
Dans une forêt de micros et de caméras, Eva Joly et José Bové ont tenté de séduire les paysans au salon de l’agriculture de Paris, ce jeudi 1er mars. Pas gagné d’avance.
Si les sondages étaient calqués sur la densité de journalistes entourant un candidat dans les travées du salon de l’agriculture, Eva Joly caracolerait en tête de peloton. De visite au salon de la porte de Versailles à Paris, le 1er mars, la candidate à la présidentielle d’Europe Écologie – Les Verts (EELV) était flanquée de José Bové, enfin décidé à sortir le bleu de chauffe pour soutenir l’ancienne magistrate. Succès assuré de l’Aveyronnais d’adoption auprès du public, et accueil plutôt cordial sur les stands du sud-ouest de la France, sur lesquels le duo écologiste reste prudemment cantonné au début de sa visite. Car dans l’entourage d’Eva Joly, on s’inquiète un peu du risque d’ « oeufs ou de tomates pourries» , dans un salon essentiellement garni de paysans proches de la FNSEA et de l’agriculture intensive.
Passé la nuée de reporters, les exposants prennent le temps de revenir sur leur situation et ce qu’ils pensent de la candidate verte, au milieu des innombrables visiteurs et d’un brouhaha incessant. Devant des vaches étonnamment présentées fessier face au public, le jeune Jérémy Guillemet, encore en formation agricole, estime que l’écologie « freine plus l’agriculture qu’autre chose » . Pour ce fils d’éleveurs vendéens qui travaillent avec 400 animaux, « il y a eu des abus dans l’agriculture en terme de pollutions, c’est vrai. Mais on a déjà du mal à nourrir le monde alors s’il faut revenir à l’ancien temps… » Et le jeune agriculteur de dénoncer « les contrôles drastiques toujours plus nombreux, les innombrables normes à respecter » . Pour lui, les écologistes au pouvoir « augmenteraient les contraintes » .
Au micro d’un stand des éleveurs de Gascogne, Eva Joly tente de convaincre les paysans : « On souhaite que les agriculteurs puissent vivre de leur travail convenablement. Nous sommes pour le circuit court, et une viande d’élevage française » . José Bové, lui, prévient que la bagarre autour de la réforme de la PAC du 1er janvier 2014 sera rude, tout en s’inquiétant de l’arrivée de viande argentine et brésilienne produite dans des conditions écologiques « scandaleuses » par la communauté de libre-échange économique du Mercosur.
Ces mots parlent à Francis Estadieu, éleveur gascon de 80 vaches qui portent « des noms, pas des numéros » : « C’est un bon message, ils peuvent nous aider » . Comme les autres éleveurs rencontrés sur le salon, Francis insiste sur leurs prix qui n’ont pas bougés « depuis 1979, alors que tout a augmenté » . Pour ce producteur laitier de l’Aveyron et fabricant de Rocamadour AOC, les écologistes risquent d’être « un peu dur avec les normes, qui sont déjà nombreuses, surtout pour un AOC » . Mais le pire, ce sont « les charges sociales très élevées. Si les charges patronales pouvaient baisser, cela nous aiderait beaucoup » . Tout ce que propose l’UMP et Nicolas Sarkozy, obnubilés par la baisse du coût du travail. « Ah oui, mais non. Sarkozy, je n’y crois pas. Je n’y crois plus » .
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