Trois francs-tireurs

Portraits de trois « twittos » passionnés de politique, très suivis sur le réseau social, qui défendent avant tout leur liberté d’expression.

Pauline Graulle  • 8 mars 2012 abonnés

Illustration - Trois francs-tireurs

Militants, eux ? Jamais de la vie ! Mais engagés, oui. Trois figures en vue sur Twitter expliquent leur action sur la toile en cette période présidentielle. La particularité de ces « twittos » : n’être affiliés à aucun parti mais réussir à peser sur le débat politique online , du fait de leur petite notoriété. Des bénévoles qui passent le plus clair de leur temps libre sur le Net et n’ont jamais cédé aux avances des partis, lesquels aimeraient pourtant bien s’en faire des alliés. Normal : la liberté est une valeur première sur le web et en particulier sur Twitter.

@Humourdedroite : l’arme de dérision massive

Slogan : « En France, soit t’as peur des Arabes, soit t’as peur de Marine Le Pen. Si t’as peur des deux, tu as une carte UMP. »

Signe distinctif : suivi par près de 100 000 abonnés sur Twitter (record dans sa catégorie), n’est abonné à personne.

Que veut-il ? : au printemps 2009, Humour de droite (HDD) est créé en réaction à « la malhonnêteté intellectuelle et au discours décomplexé des jeunes populaires, des Bigard, Sardou et autres humoristes [sic] sarkozystes » . En 2012, HDD est entré dans une « guérilla » pour inciter à aller « voter du bon côté » .

Qui est-il ? : derrière HDD, se cachent six « potes d’enfance ou de boulot » , trentenaires « plutôt de gauche mais surtout anti-UMP » , qui travaillent en région parisienne dans l’Internet, la communication ou la création. Ils tiennent à conserver leur anonymat vis-à-vis de leur employeur, pour garder leur liberté de ton et « parce qu’on n’a rien d’exceptionnel » .

Que fait-il ? : chaque représentant de HDD tweette ce qu’il veut quand il veut, sans tabou. Les vannes « provoc » en 140 signes ont fait le succès de HDD. Si la droite est sa cible favorite, HDD tape aussi sur la gauche, et ne rechigne jamais devant un bon mot, fût-il de mauvais goût… Exemple, au lendemain de l’agression d’Audrey Pulvar par des militants d’extrême droite lui ayant crié « Juden ! » : « Après Pulvar la juive, il paraîtrait que Jean-Vincent Placé vient de se faire traiter de bougnoule. Sont vraiment cons, ces frontistes. »
L’essentiel est de faire rire… au énième degré : « L’humour permet de montrer l’absurdité des horreurs que prononce l’UMP. Et puis, qui n’aime pas rire et jouer ? »

@Vogelsong : l’intello lucide

Slogan : « Chicaneur et non-violent ».

Signe distinctif : 60 000 tweets à son actif – un rythme quasi surhumain ! En fait, Vogelsong préfère écrire sur son blog, qu’il a ouvert en réaction à l’élection de Sarkozy (http://piratages.wordpress.com/) ou sur le blog du Lab d’Europe 1, pour lequel il est rémunéré.

Que veut-il ? : Vogelsong veut faire partir Sarkozy et, surtout, s’amuser intelligemment dans l’arène politique. « Les gens n’ont pas trop d’avis et aiment qu’on en ait un pour eux. Hélas, je ne crois pas avoir convaincu une seule personne sur Twitter. »

Qui est-il ? : un quadra parisien, plutôt timide, qui travaille dans le secteur des médias. Vogelsong « assume » ses activités de blogueur, mais il ne s’en vante pas non plus auprès de ses proches. Sympathisant de François Hollande, il a refusé d’être intégré dans l’équipe de campagne web du candidat car il « n’aime pas les casernes »  et veut « pouvoir continuer à critiquer » la gauche.

Que fait-il ? : Vogelsong est connu pour ses « live-tweets » de la matinale de France Inter. Pour lui, Twitter fait partie de ses activités « intersticielles »  : « Quand une pensée vient, je la tweete. » Et Vogelsong pense beaucoup !

@Koztoujours : le « twittos » de droite

Slogan : « Tête de pont ®, Défenseur du Pape et des Cochons ® » .
Signe distinctif : l’un des rares twittos de droite (catholique), non encarté à l’UMP.

Que veut-il ? : montrer qu’il existe une autre droite que la droite sarkozyste (pour qui il a voté en 2007), dont certaines valeurs le répugnent. Pour le carême, Koztoujours a néanmoins décidé de prendre un peu de distance avec cette campagne web dont il déplore l’atmosphère « moins facétieuse, plus crispée et plus militante qu’en 2007 » .

Qui est-il ? : twittos depuis 2008, Erwan Le Morhedec est avocat en droit des affaires. Chose rare dans ce monde d’avatars, Koztoujours a dévoilé son identité au grand public.

Que fait-il? : il préfère l’écriture d’analyses sur son blog aux « réactions viscérales » de Twitter, tout de même bien pratique pour diffuser ses billets…

Publié dans le dossier
La campagne 2.0
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