La colonisation en Cisjordanie s’intensifie
Maisons détruites, Palestiniens jetés à la rue : Israël profite de l’impasse des négociations pour multiplier les évacuations.
dans l’hebdo N° 1200 Acheter ce numéro
Ces événements seraient presque anecdotiques, hélas. Ils sont surtout symboliques d’une situation d’impasse dont profite le gouvernement israélien pour accélérer la colonisation. La police israélienne a évacué le 18 avril une famille palestinienne de deux maisons d’un quartier de Jérusalem-Est, à la suite d’une « bataille juridique » menée par des colons juifs.
Les 14 membres de la famille Natsché ont été chassés à l’aube de leur demeure du quartier de Beit Hanina. Plusieurs générations y avaient habité depuis soixante ans. Le même jour, les autorités israéliennes ont fait détruire des maisons de Khalayleh, au nord de Jérusalem, mettant à la rue 54 personnes, dont 35 enfants.
Ces affaires illustrent le processus de colonisation de Jérusalem-Est, mené sans répit par Israël. On comprend pourquoi le gel de la colonisation est la condition posée par les Palestiniens avant toute reprise des négociations. En fait de « conditions », il s’agit pour les Palestiniens de déjouer la stratégie israélienne qui consiste, depuis 1996, à mettre à profit un interminable « processus de paix » pour coloniser les territoires palestiniens. Cela, jusqu’à réduire à néant l’objet même de la négociation.
Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a récemment adressé une lettre à Benyamin Netanyahou, pour renouveler son exigence de gel de la colonisation. Le négociateur palestinien, Saëb Erekat, a indiqué que M. Abbas attendait une réponse du Premier ministre israélien dans les deux prochaines semaines. Mahmoud Abbas demande la reprise des négociations sur la base des frontières de 1967, et la libération des détenus. Un mouvement de grève de la faim a d’ailleurs été entamé la semaine dernière par au moins 1 350 prisonniers palestiniens sur les presque 5 000 détenus dans les prisons israéliennes [^2].
Sans réponse satisfaisante, l’Autorité palestinienne relancerait devant le Conseil de sécurité les démarches entamées le 23 septembre dernier à l’Assemblée générale de l’ONU, pour obtenir la reconnaissance internationale de l’État palestinien. Faute de pouvoir compter sur le nombre de voix nécessaire au Conseil de sécurité, elle se retournerait vers l’Assemblée générale pour obtenir un statut d’État non membre.
La démarche palestinienne vise surtout à prendre une nouvelle fois à témoin l’opinion internationale, car la réponse israélienne ne fait guère de doute. Saëb Erekat a cependant réaffirmé que la dissolution de l’Autorité palestinienne n’était « pas à l’ordre du jour ». Il dissipe ainsi une ambiguïté née d’un propos de Mahmoud Abbas, indiquant que « l’Autorité palestinienne avait perdu sa raison d’être ».
La stratégie de la dissolution de l’Autorité, qui reviendrait à signifier à la communauté internationale l’échec définitif du processus de paix, ne manque pas de partisans, notamment parmi les intellectuels palestiniens.
[^2]: Officiellement, 4 699 Palestiniens sont détenus dans les prisons israéliennes.