Les socialistes et le pouvoir : de Blum à Hollande

De qui François Hollande est-il l’héritier ? Il peut se réclamer d’une longue histoire, celle des socialistes qui ont eu le pouvoir en France au XXe siècle. Le souhaite-t-il ? Ce n’est pas certain, tant cette histoire est contrastée. Nous revenons ici sur quatre personnalités, quatre situations et quatre bilans : Léon Blum et le Front populaire, Guy Mollet et le Front républicain, Mitterrand et le nouveau PS issu du congrès d’Épinay, Lionel Jospin, enfin, et la Gauche plurielle. Les situations, ce sont les grandes grèves du printemps 1936, la guerre d’Algérie et la crise de la IVe République, l’effondrement du bloc soviétique et la mondialisation libérale.

On aurait pu aussi évoquer cette période charnière de la Libération avec trois gouvernements présidés par un socialiste : Félix Gouin, Léon Blum et Paul Ramadier. Le deuxième fut entraîné bien malgré lui dans la guerre d’Indochine voulue par l’un de ses ministres, Marius Moutet ; le dernier a « couvert » l’épouvantable répression de l’insurrection malgache, en mars 1947. Sur un plan politique, cette période a été marquée par une hésitation entre deux alliances : avec le PCF ou avec les démocrates-chrétiens du MRP. Ce fut d’abord le « tripartisme » et le refus de choisir, puis le renvoi des communistes du gouvernement par Ramadier en mai 1947 et le glissement à droite. C’est aussi ce gouvernement et son ministre de l’Intérieur, Jules Moch, qui fit donner les CRS contre des grévistes, provoquant la mort de six manifestants. Entre conquêtes sociales et colonialisme, l’héritage est loin d’être toujours glorieux. Pas question évidemment de faire endosser la part d’ombre à François Hollande. Le nouveau président est de la génération du tournant libéral. Saura-t-il s’émanciper d’une gestion néolibérale de la crise ? Si l’histoire fait ressortir une constante, c’est la vulnérabilité des socialistes aux rapports de force. On peut en déduire qu’un mouvement social fort peut avoir un rôle décisif.