L’antinucléaire prend au Brésil
Plusieurs réacteurs nucléaires sont en projet. Mais une campagne d’opposition s’organise.
dans l’hebdo N° 1209 Acheter ce numéro
Devant une cinquantaine de participants au Sommet des peuples de Rio, Jaime Henrique Chemelo conte son périple à Tchernobyl comme une expérience initiatique. Ancien président de la puissante Confédération nationale des évêques brésiliens, il a été invité en avril dernier par l’ONG écologiste Green Cross, fondée par l’ancien président soviétique Gorbatchev, en tant qu’émissaire de son Église pour témoigner du désastre nucléaire dans un pays encore assez peu concerné par la question. Choc : la carte de l’Europe contaminée par les retombées radioactives. « Il y en a partout ! S’il y a un accident chez nous, rien ne sera épargné… Je n’y connaissais rien avant, mais désormais je suis un opposant total ! »
Le Brésil dispose de deux réacteurs, à Angra, côte sud de l’État de Rio de Janeiro. Un troisième, longtemps gelé, doit être mis en chantier sur le même site. L’ex-président Lula a signé l’autorisation de construction de quatre nouveaux réacteurs, notamment dans le Nordeste. Mais, depuis Fukushima, le Brésil sort d’une certaine indifférence sur la question nucléaire. Les études lancées pour les nouveaux projets sont au ralenti. Le Parti des travailleurs, actuellement au pouvoir, est divisé sur la filière. Il pourrait y renoncer au vu des coûts croissants mais aussi des risques, sous la pression de l’opinion si elle les perçoit mieux, calcule Rafael Ribeiro, un opposant historique. « Le Brésil n’a pas la moindre capacité de réaction en cas d’accident. » Chico Whitaker, l’un des fondateurs du Forum social mondial, consacre beaucoup d’énergie à divulguer une campagne d’opposition pédagogique – la première du genre au Brésil –, demandant l’abandon total de cette filière. « Jamais je n’ai perçu autant d’intérêt pour la question qu’à l’occasion de ce Sommet des peuples. »