Imposer la rigueur sans faire de vagues

Derrière l’apparent respect du calendrier des promesses, se dessine un tour de vis budgétaire qui n’épargnera personne.

Michel Soudais  • 12 juillet 2012 abonné·es

Aller vite. Telle est en ce début d’été la ligne de conduite du gouvernement. En respectant pour l’essentiel le calendrier que François Hollande et ses amis s’étaient fixé avant d’arriver à l’Élysée, le nouveau pouvoir entend montrer qu’il tient ses promesses. Chaque ministre est ainsi tenu de rappeler les principaux éléments de cette check-list. L’augmentation du pouvoir d’achat des classes populaires ? L’augmentation de 25 % de la prime de rentrée scolaire et le fameux « coup de pouce » au Smic de 0,6 % y pourvoient. La renégociation du pacte budgétaire ? Fait également, assurent-ils en chœur. La refondation de l’école ? La concertation est lancée depuis le 5 juillet. La relance du dialogue social ? Voyez la conférence sociale de ce début de semaine…

Cette orchestration d’événements quasi quotidiens emporte l’actualité dans un tourbillon dont le principal effet escompté est d’empêcher l’opinion d’en saisir le sens par une multiplication des annonces. Pourtant, en une dizaine de jours, même si le terme est encore contesté dans les rangs de la majorité, qui préfère parler de « redressement dans la justice », de « sérieux » ou de « responsabilité » budgétaire, c’est bien une politique de rigueur qu’esquisse le gouvernement. Après d’ultimes arbitrages, l’équipe de Jean-Marc Ayrault a annoncé le 4 juillet que son plan de redressement des finances publiques passait dès cette année par 7,2 milliards d’euros de hausses d’impôts qui s’ajoutent aux 15 milliards déjà votés par la droite avant la présidentielle. Ainsi que 1,5 milliard de gel supplémentaire des dépenses. « Il y a bien une ardoise cachée que nous devons honorer pour respecter l’objectif d’un retour des déficits publics à 4,5 % du PIB » fin 2012, a fait valoir le ministre délégué au Budget, Jérôme Cahuzac, en évoquant « un certain nombre de recettes surestimées » par le gouvernement précédent et la « très mauvaise surprise » de deux contentieux fiscaux qui coûteront à la France « 1,5 milliard d’euros cette année et 5 milliards d’ici à 2014 ». Si ces premières hausses d’impôt ciblent les entreprises et les ménages les plus aisés, qui ont largement profité des cadeaux consentis par l’UMP ces dix dernières années, les prochaines n’épargneront personne.

Avec l’objectif maintenu d’un retour à l’équilibre du budget en 2017, la révision des prévisions de croissance, abaissées à 0,3 % pour 2012 et 1,2 % pour 2013, a pour conséquence immédiate un tour de vis sur les dépenses publiques, dont la progression, a annoncé Jean-Marc Ayrault, doit être limitée à 0,8 % par an en volume sur l’ensemble du quinquennat. Le programme du candidat François Hollande était bâti sur une hausse de 1,1 %. Le Premier ministre a aussitôt demandé aux ministères de réduire leurs dépenses de fonctionnement de 7 % en 2013, 4 % en 2014 et 4 % encore en 2015 ; et prévenu que des efforts seront « demandés à chacun : État, Sécurité sociale et collectivités locales ». Pour rester dans les clous européens, l’effort budgétaire nécessaire pour 2013 devrait être de 33 milliards d’euros, estime la Cour des comptes. Si le gouvernement a immédiatement écarté l’hypothèse d’une hausse de la TVA, la possibilité d’une augmentation de la CSG s’accroît : cette hypothèse, que Bercy n’excluait pas, a obtenu les faveurs de M. Hollande, lundi, quand ce dernier a mis à l’ordre du jour une « nécessaire réforme » du mode de financement de la protection sociale « pour qu’il ne pèse pas seulement sur le travail ». En ouverture de la conférence sociale, le président de la République s’est rangé à l’idée, soutenue par son prédécesseur, que l’économie française souffre d’un problème de coût du travail trop élevé. Il n’a pas dit qu’il ne fallait pas augmenter les salaires, mais cela revient au même. En plus soft.

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