Japon : reprise nucléaire impopulaire

Les autorités locales et nationales ont autorisé le redémarrage de deux réacteurs.

Marion Perrier  • 12 juillet 2012 abonné·es

Àpeine deux mois. C’est le temps qu’aura tenu le Japon sans aucune énergie nucléaire. Alors que, depuis le 5 mai, l’ensemble des 50 réacteurs du pays étaient à l’arrêt, pour maintenance ou contrôle de sécurité, le gouvernement et les autorités locales ont donné leur accord à la compagnie Kansai Electric Power pour redémarrer les réacteurs 3 et 4 de la centrale d’Ohi, à l’ouest du pays.

Selon le Premier ministre, Yoshiko Noda, cette décision doit permettre au pays de faire face aux pics estivaux de consommation d’électricité. Dès le début du mois de juin, il s’était inquiété des conséquences d’une pénurie sur l’économie et la vie des citoyens japonais, en rappelant que le nucléaire représentait, avant l’accident de Fukushima, en mars 2011, environ 30 % de la production d’électricité.

Ce sont les autorités locales qui, depuis la catastrophe, bloquaient le redémarrage des réacteurs, ce qui a entraîné une explosion des importations japonaises de gaz et de charbon pour alimenter les centrales thermiques du pays. Aux yeux de nombre d’associations, la préfecture de Fukui et la municipalité d’Ohi ont, en autorisant le redémarrage, cédé à la pression des intérêts économiques sans tenir compte de la sécurité des citoyens. « Il s’agit de la province dont les revenus dépendent le plus des subventions des firmes électriques », explique Charlotte Mijeon, du réseau Sortir du nucléaire.

Malgré la pétition lancée par le mouvement « Adieu l’énergie nucléaire », qui a recueilli 7,5 millions de signatures, et en dépit de manifestations réunissant des dizaines de milliers d’opposants au redémarrage, le réacteur n° 3 de la centrale d’Ohi a repris son activité le 1er juillet. Comme le n° 4, il a réussi les tests de sécurité exigés depuis Fukushima. Mais beaucoup craignent que ces études aient été réalisées un peu vite.

« Le sismologue Mitsuhisa Watanabe a montré que des failles sismiques actives se trouvaient à proximité de la centrale », rappelle Charlotte Mijeon. Des associations japonaises ont également mis en cause les chiffres publiés par la Kansai Electric Power concernant la pénurie d’électricité à venir : ils seraient fondés sur des estimations qui ignorent les récentes mesures d’économie d’énergie. Et comme pour légitimer la méfiance des antinucléaires, le rapport de la Commission indépendante chargée par le Parlement de l’enquête sur les causes de l’accident de Fukushima a souligné, la semaine dernière, la « collusion » entre les compagnies d’électricité et les autorités de sûreté nucléaire. De quoi alimenter la colère des Japonais, dont les associations espèrent que la mobilisation finira par l’emporter.

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