À contre-courant / Leçon de choses à PSA

Thomas Coutrot  • 20 septembre 2012 abonné·es

La fermeture annoncée de PSA Aulnay et les 20 000 suppressions d’emplois directs et indirects qu’elle implique constituent une véritable leçon de choses sur le capitalisme européen, et un test décisif pour François Hollande. Le rapport sur PSA d’Emmanuel Sartorius, l’expert désigné par Arnaud Montebourg, identifie trois causes majeures des pertes actuelles du groupe automobile : une trop forte dépendance au marché européen, en crise ; la percée des constructeurs coréens en Europe à la suite de l’accord de libre-échange en vigueur depuis juillet 2011 ; et une distribution excessive de cash aux actionnaires qui a handicapé les investissements du groupe dans les véhicules d’avenir.

PSA écoule 60 % de ses voitures dans trois pays : la France, l’Espagne et l’Italie. Ses ventes sur ces marchés se sont effondrées : en 2011, respectivement – 2 %, – 18 % et – 11 %. Et au premier semestre 2012 : – 14 %, – 8 % et – 20 % ! La montée de la concurrence coréenne – Hyundai et Kya – est réelle, mais les coupables sont ailleurs : l’Union européenne et les gouvernements qui mènent d’impitoyables politiques d’austérité. Parler de « redressement productif » dans ce contexte est une aimable plaisanterie. C’est pourquoi la lutte des travailleurs de PSA et la campagne contre la ratification du pacte budgétaire européen ne sont qu’un seul et même combat.

Redresser l’économie européenne supposerait un véritable programme à long terme d’investissements dans la reconversion écologique. Dans le cas de PSA, les actionnaires privés en sont clairement incapables. S’impose donc une prise de contrôle capitalistique par les pouvoirs publics. Pas pour confier la gestion de l’entreprise aux technocrates de Bercy, mais pour organiser un grand débat national – et européen – sur les politiques d’urbanisation et de transports, avec les syndicats, les usagers et les associations écologistes. Ceci afin de définir les besoins sociaux et d’utiliser les compétences des personnels pour les satisfaire.

Le « plan Montebourg » de soutien à la filière automobile prévoit des incitations – timides – en faveur des véhicules hybrides, moins polluants. On pourrait exiger des mesures plus fortes, mais, dans l’état actuel de la concurrence internationale, les constructeurs asiatiques emporteront l’essentiel de ces marchés – comme c’est déjà le cas avec les capteurs solaires. Sans une remise en cause du libre-échange, par une politique de relocalisation coopérative grâce à une taxe kilométrique, la transition écologique ne peut que s’accompagner d’un désastre économique et social. Et même écologique, le commerce mondial et les transports internationaux accélérant les émissions de gaz à effet de serre. En se contentant – comme l’y incitent les « experts » – d’un accompagnement social de la fermeture de PSA Aulnay, le gouvernement socialiste fera un pas supplémentaire vers le renoncement. Au grand bénéfice de la droite dure, qui n’aura plus qu’à ramasser la mise. À moins que le fatalisme distillé par les pouvoirs ne soit renversé par les initiatives citoyennes.

Économie
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