Climat : un sceptique échaudé
Richard Muller, l’un des inspirateurs américains de Claude Allègre, reconnaît s’être trompé. Les « anti-réchauffistes » ont du plomb dans l’aile.
dans l’hebdo N° 1218 Acheter ce numéro
Alors que les écrits de Claude Allègre et de ses comparses continuent d’alimenter de ce côté-ci de l’Atlantique beaucoup de sites Internet et quelques revues, les « climatosceptiques » états-uniens viennent de perdre l’un des leurs parmi les plus connus et les plus écoutés : Richard Muller. Ce professeur de l’université de Berkeley, cofondateur d’un programme scientifique sur l’évolution des températures de la planète, a battu sa coulpe en expliquant à ses pairs et à ses étudiants que le réchauffement climatique est une réalité, et que les gaz à effet de serre émis par les activités humaines en sont la cause principale. Retournement spectaculaire pour un scientifique qui s’est fait connaître par ses critiques virulentes contre ceux qu’il appelait les « réchauffistes ». Le programme de recherche du physicien a été fondé et financé par un milliardaire du pétrole, le libertarien Charles Koch, adversaire des climatologues travaillant pour l’ONU au sein du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec). Il est connu, comme son frère David, pour soutenir les groupes de climatosceptiques dans la soixantaine de pays, y compris la France, où opèrent les filiales de Koch Industries, multinationale affichant un chiffre d’affaires de 100 milliards de dollars. Richard Muller a confirmé sa « volte-face » dans un article paru le 28 juillet en une du New York Times, intitulé « la conversion d’un climatosceptique ». En expliquant que les études menées par son programme l’avaient mené à des découvertes dont la gravité se « situe au-delà de celles effectuées par le Giec, et [qui] seront publiées dans quelques mois sur le site de l’université de Berkeley ».
Il avait fallu un an à Claude Allègre pour estimer qu’une tribune parue le 18 juin 2009 dans Politis, et portant la signature de huit scientifiques et économistes de renom, était diffamatoire. Et, au total, après les atermoiements de notre adversaire et un report, c’est plus de trois ans après les faits que l’affaire devait venir les 20 et 21 septembre devant la 17e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris. Nous avons appris mardi 11 septembre que notre adversaire avait finalement décidé de se désister. Notre avocat, Me Antoine Comte, a reçu mardi matin un courrier de l’avocat de Claude Allègre lui indiquant la décision de son client.
Rappelons que l’attaque contre Politis avait donné lieu à une pétition qui avait recueilli quelque 10 000 signatures. En outre, 23 scientifiques et journalistes avaient décidé « d’alerter leurs professions » jugeant que « le comportement de Claude Allègre » posait « un problème d’éthique ».
Nous reviendrons la semaine prochaine sur cette affaire à rebondissements.
En France, les articles « anti-réchauffistes » peuvent se lire sur les sites de l’Institut Montaigne, de l’Institut Turgot, sur Agoravox, Wikilibéral, ou sur celui de l’Association française pour l’information scientifique, qui veut « promouvoir la science contre ceux qui nient ses valeurs culturelles, la détournent vers des œuvres malfaisantes ou encore usent de son nom pour couvrir des entreprises charlatanesques. Elle se veut indépendante de tout groupe de pression et veut éviter toute concession au sensationnalisme, à la désinformation et à la complaisance pour l’irrationnel ». Un site qui milite aussi pour l’extraction des gaz de schiste, le nucléaire, les OGM et contre le principe de précaution… Quand Claude Allègre reste silencieux, Christian Gérondeau, polytechnicien et ex-chantre de la voiture à la tête de l’Automobile Club, alimente la polémique avec ses deux livres phares, CO2, un mythe planétaire et l’Écologie et les comploteurs. Le géographe de droite Jean-Robert Pitte, ancien président de la Sorbonne et spécialiste des paysages et de gastronomie, le romancier Pascal Bruckner et Jean de Kervasdoué, enseignant au Conservatoire national des arts et Métiers, ont aussi contribué au cours des trois dernières années à essayer de déconsidérer les climatologues du Giec. Ils ont été non seulement entendus par les politiques américains, mais aussi par une partie de l’opinion publique et par des ministres ou parlementaires français trop contents de ne rien faire en s’appuyant sur les écrits de personnalités connues. Comme si la notoriété et l’exposition médiatique avaient valeur de légitimation.