À contre-courant / Les renoncements de l’Union européenne
dans l’hebdo N° 1228 Acheter ce numéro
Les politiques d’austérité imposées dans l’Union européenne enfoncent celle-ci dans une récession durable dont le coût social est considérable. La pauvreté augmente : 20 millions de personnes souffrent de la faim dans l’espace européen. Les moins de 25 ans sont particulièrement touchés. Le chômage des jeunes a augmenté de plus de 50 % depuis le début de la crise. On dénombrait 5,5 millions de jeunes chômeurs en août 2012, soit un taux historique de 22,7 % en moyenne dans l’UE, et qui dépasse 50 % en Grèce et en Espagne.
Dans cette course folle à l’austérité, et en dépit de cette situation dramatique, deux programmes européens emblématiques sont menacés : le Programme européen d’aide alimentaire (PEAD) pour les plus démunis, et le dispositif Erasmus favorisant la mobilité des étudiants dans les universités. Mis en place en 1986, le PEAD s’appuyait à l’origine sur les surplus engendrés par la politique agricole commune (PAC), ces derniers étaient vendus, les recettes étant redistribuées aux pays membres pour aider les plus démunis via des associations comme les Restos du cœur en France. Les surplus agricoles ayant disparu à la suite de la réforme de la PAC, les autorités européennes ont demandé des contributions financières aux pays membres. C’est cette aide financière que six pays du Nord, parmi les plus riches (1), ont remise en question. De 480 millions, le budget de la PEAD devait passer à 113 millions d’euros… Après d’âpres négociations, les mauvais payeurs ont accepté de prolonger cette aide jusqu’en 2014, à condition que ce programme social s’arrête à cette échéance précise, chaque pays membre devant à l’avenir nourrir lui-même ses propres pauvres…
Le même scénario s’est produit pour Erasmus, qui a quand même profité à plus de 3 millions d’étudiants depuis sa création en 1987. Il est aujourd’hui menacé, comme d’autres programmes, par la décision des gouvernements de réduire le budget européen en 2013. On peut espérer que le programme Erasmus ne sera pas supprimé, car celui-ci dispose d’un fort soutien dans les opinions publiques. Mais on peut craindre que son budget de 460 millions d’euros soit en baisse à l’avenir…
Les remises en cause du PEAD et d’Erasmus, qui représentent moins de 1 % du budget européen, amènent à tirer des leçons inquiétantes pour l’avenir de l’Union européenne. En premier lieu, la solidarité entre les pays de l’UE – qui était en principe au cœur de la construction européenne – tend à disparaître, même quand il s’agit d’aider les victimes des politiques d’austérité. Ensuite, les pays européens n’hésitent pas à sacrifier sur l’autel d’une austérité aveugle les investissements d’avenir pour la jeunesse. Enfin, les pays et les autorités de l’UE choisissent de réduire un budget ridiculement faible, de l’ordre de 1 % du PIB des pays européens, au moment où il serait nécessaire de l’augmenter fortement pour doter enfin l’UE d’une politique budgétaire et fiscale commune, indispensable à la survie de la construction européenne !