Internes : Un combat à coeur ouvert
Les internes ont manifesté mardi pour mettre fin à la confusion entre leurs revendications et celles des médecins libéraux.
dans l’hebdo N° 1228 Acheter ce numéro
Quelles sont les revendications des internes ? Les jeunes praticiens hospitaliers ont participé, le 12 novembre, au mouvement d’une partie des médecins libéraux contre les dépassements d’honoraires, mais avec d’autres motifs. Mardi 20, ils ont tenu à manifester de nouveau pour marquer la différence. « Il y a eu un amalgame qui a rendu le mouvement flou. Les internes n’ont pas manifesté pour les dépassements d’honoraires », explique un médecin généraliste tout juste sorti des trois ans d’internat et auteur d’un blog sur la vie des internes (drfoulard.fr). Pour lui, les jeunes praticiens ont été associés contre leur gré à des mouvements éloignés de leurs revendications. « Les syndicats de la médecine libérale qui ont signé avec la ministre de la Santé, à la fin du mois d’octobre, les accords sur les dépassements d’honoraires ne sont pas représentatifs. Mais ils ont quand même réussi à instrumentaliser les internes », explique Didier Ménard, président du Syndicat de la médecine générale (SMG). « Les internes ont manifesté pour exprimer un ras-le-bol contre le démantèlement du service public de santé et cette proposition de loi de Bruno Le Roux [chef de file des députés socialistes] qui pourra imposer un niveau de prestations différent selon les médecins au détriment des patients. Ensuite, pour dénoncer leurs conditions de travail inacceptables », rappelle Étienne Pot, porte-parole de l’Intersyndicat national des internes des hôpitaux (ISNIH). Et d’ajouter : « Pour que le travail des internes soit respecté, il suffirait d’appliquer la loi sur le repos de sécurité [imposant 11 heures de pause après une garde de 24 heures], qui existe depuis dix ans. »
Selon une enquête menée dans les hôpitaux, publiée en septembre par l’ISNIH, 85 % des internes travaillent bien au-delà des 48 heures hebdomadaires réglementaires, avec une moyenne de 60 heures. Autre constat, le « repos de sécurité », imposé depuis 2002 pour empêcher plus de 24 heures de travail consécutives, n’est pas respecté dans 21 % des cas. Des dérives qui entraînent souvent des erreurs. Depuis l’accord sur les dépassements d’honoraires, les internes craignent aussi que l’on remette en cause leur liberté d’installation. « Nous ne voulons pas de ces mesures coercitives, explique Étienne Pot. Pour résoudre la question des déserts médicaux, nous réclamons un vrai contrat d’engagement de service public. Et les médecins qui s’installent dans ces zones doivent être bien rémunérés. » Gérald Kierzek, médecin urgentiste de l ’ Hôtel – Dieu à Paris, plaide pour une révolution : « Il faut revoir la rémunération des médecins sur des critères précis comme la pénibilité, les risques, le volume de l’activité, le salaire, surtout pour le secteur 1 [^2]. C’est un enjeu de santé publique. » Les internes souhaitent que ces revendications soient entendues lors de la concertation entre les médecins et les élus locaux, qui devrait aboutir, début 2013, à un plan de lutte contre les déserts médicaux.
[^2]: Correspondant au tarif qui sert de base au remboursement de l’assurance-maladie.