Je ne les aime guère
dans l’hebdo N° 1232-1234 Acheter ce numéro
L’autre jour, j’ai lu dans le Canard enchaîné que Françoizollande, chef de l’État français, avait dans un premier temps trouvé plutôt marrant que François Copé et Jean-François Fillon – les bozos de l’UMP – se foutent sauvagement sur la gueule… mais qu’il avait ensuite déploré que ces deux-là s’exhibent ainsi, parce que bon, mâme Dupont, quel affligeant spectac, hein – et comment s’étonner, après cela, que les Françai(se)s soient dégoûté(e) s de la politique ?
Puis, juste après, je suis tombé dans le Monde sur un papier (il va de soi grotesque) narrant que nombre d’éminences « socialistes [^2] » considéraient itou que « la guerre des chefs [^3] » de « la droite » risquait de dégoûter-encore-un-peu-plus-les-Françai(se)s-de-la-politique [^4]. Et certes : il vaut mieux lire ça que d’être sourd (comme l’écrivit jadis le grand Ludwig van dans une très fameuse lettre à Ray Charles).
Mais en même temps : qui sont au juste ces gens qui affichent tout soudain cette noble préoccupation ? Ces gens sont les mêmes, exactement, qui, à chaque fois qu’ils ont été, depuis trente années, aux affaires, n’ont eu d’autre hâte que de prendre plusieurs kilomètres d’élan pour mieux sauter à pieds joints sur leurs promesses de campagne. Ces gens sont les mêmes, exactement, qui ont d’abord fait le serment qu’ils en finiraient (si qu’on leur concédait la gracieuseté de filer quelques votes) avec le capitalisme – mais qui, dès qu’ils ont pu, se sont plutôt courbés devant les marchés, puis agenouillés, puis, finalement, complètement aplatis.
Ces gens sont les mêmes, exactement, qui ont ensuite juré de changer la vie, et qui l’ont, en effet, profondément modifiée – en la faisant toujours plus dégueulasse pour qui n’est pas titulaire d’un compte en banque gérarddepardéique. Ces gens sont les mêmes, exactement, qui, depuis trois décennies, terminent les sales boulots de la droite en cacardant qu’oui, mais qu’eux sont de gauche, et que c’est donc pas pareil, ou si les mots veulent plus rien dire ? Et qui, cette fois-ci – depuis le mois de mai dernier –, semblent vouloir se surpasser eux-mêmes dans la félonie – et qui, de fait, ont déjà trahi, dans l’espace d’un semestre, et par une manière de glauque record, la presque totalité de leurs engagements de l’an passé.
Adoncques, ces « socialistes » sont les mêmes qui nous accablent de leurs continuelles trahisons sans jamais se demander si nous n’en éprouvons pas un incommensurable dégoût, mais qui tout d’un coup font mine, dans un nouvel accès de tartuferie, de redouter que les bouffonneries de l’UMP ne nous « détournent » de ce qu’ils appellent (sans vergogne) « la politique » – et quant à moi, je puis bien te l’avouer : je ne les aime guère
[^2]: Le Monde ne met bien sûr pas de guillemets à ce mot, mais quant à nous, nous savons à quoi nous en tenir, pas vrai ?
[^3]: Aimes-tu ces clichetons de journaleux ?
[^4]: Et bien sûr : cet avis était aussi partagé par les tristes clowns de l’éditocratie, jamais en retard d’une leçon de maintien à deux balles.
Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.