À contre-courant / Banques : le recul
dans l’hebdo N° 1236 Acheter ce numéro
La fin de 2012 a été marquée par deux faits apparemment sans lien : l’adoption en conseil des ministres, le 19 décembre, d’une loi « portant réforme bancaire et financière », et l’annonce, hélas sans surprise, le 27 décembre, d’une hausse du chômage en novembre, pour le 19e mois consécutif, conséquence fatale des politiques d’austérité menées en France et dans la zone euro. Malgré ses promesses, le gouvernement Hollande poursuit la politique de rigueur budgétaire et salariale de la droite. Cet excès d’austérité a un effet récessif direct et sape la confiance. En 2013, l’effort d’ajustement des finances publiques imposé aux peuples européens va coûter 1,8 point de PIB en France, 2,1 points en Italie, 2,4 en Espagne et 4 en Grèce. Dans ces conditions, le pari du gouvernement français de sortir de la récession cette année est intenable. Sans changement de politique, le déficit public augmentera, faute de rentrées fiscales suffisantes, et l’explosion du chômage se poursuivra d’une manière dramatique.
Pourquoi un tel aveuglement alors qu’aujourd’hui une majorité d’experts, y compris ceux du FMI (c’est dire !), sont convaincus des méfaits de cet excès d’austérité ? La raison principale est que ceux qui nous gouvernent n’ont pas la volonté politique de sortir de la logique infernale à laquelle les conduit leur soumission aux exigences du capitalisme financier. Pour ce gouvernement, comme pour les précédents, l’objectif est de rassurer les marchés financiers. Ces derniers sont d’ailleurs satisfaits puisque les investisseurs internationaux acceptent (pour combien de temps ?) d’acheter la dette publique française à des taux d’intérêt très bas, proches de zéro !
C’est également pour rassurer les financiers et les banquiers que le gouvernement français a adopté une nouvelle loi bancaire le 19 décembre dernier. Dans son discours du Bourget du 22 janvier 2012, le candidat François Hollande déclarait vouloir « maîtriser la finance […] par le vote d’une loi sur les banques qui les obligera à séparer leurs activités de crédit de leurs opérations spéculatives ». Or, le projet de loi propose de séparer les « activités bancaires utiles » des « activités bancaires spéculatives ». Il n’est plus question d’ « activités de crédit ». Ce changement de vocabulaire n’est pas innocent : il permet aux auteurs du projet de loi de déclarer « utiles » l’activité de « fourniture de services d’investissement à la clientèle », ainsi que celle de « tenue de marché sur instruments financiers ». Ces activités, qui relèvent de la banque d’investissement et dont une grande partie est pourtant spéculative, pourront rester au sein de la banque de détail car elles sont jugées « utiles ». Sous la pression du lobby bancaire, François Hollande devenu président renonce donc à séparer la banque de détail de la banque d’investissement, réforme pourtant indispensable si l’on veut mettre les établissements bancaires au service de la société. Seuls la résistance et le soulèvement des mouvements sociaux, des militants politiques, des intellectuels progressistes et des citoyens ordinaires contraindront l’oligarchie politico-financière qui gouverne la France et l’Union européenne à renoncer à ses politiques contraires à l’intérêt général.