Israël : Le Likoud, un favori chancelant
À une semaine des élections législatives, le parti du Premier ministre, Benyamin Netanyahou, est menacé sur sa droite.
dans l’hebdo N° 1236 Acheter ce numéro
Quelque cinq cents policiers israéliens ont évacué, dimanche, des manifestants palestiniens qui avaient établi un camp pour protester contre un projet d’extension d’une colonie israélienne, entre Jérusalem-Est et la colonie de Maale Adumim. Un projet stratégique puisqu’il vise à briser la continuité territoriale du territoire palestinien, hypothéquant la création d’un futur État. Cette intervention contre une manifestation pacifique est d’autant moins étonnante que Benyamin Netanyahou, en pleine campagne électorale, dispute à de nouveaux concurrents les voix des colons. L’alliance de son parti, le Likoud, avec un autre parti d’extrême droite, Israël Beiteinou, dirigé par l’ancien ministre Avigdor Lieberman, raciste notoire, a subi une érosion au cours des derniers jours. Inculpé pour fraude et abus de confiance, Lieberman n’est pas, il est vrai, le meilleur atout popularité du Premier ministre dans un pays gangrené par la corruption.
Cette coalition ne devrait obtenir que 34 sièges aux élections du 22 janvier, selon un sondage publié par le quotidien Haaretz début janvier. Une baisse sensible puisque, sur les 120 sièges de la Knesset, elle en possède aujourd’hui 42. Ce recul ne profite guère à la gauche, mais plutôt à l’extrême droite. Pourtant, l’ancienne Première ministre Tzipi Livni, fondatrice du parti centriste Hatnuah, a invité le Parti travailliste et le parti centriste Yesh Atid à « faire campagne commune jusqu’aux élections ». À eux trois, ces mouvements dépassent le score de l’alliance de Netanyahou. Ils remporteraient entre 36 et 38 sièges selon les sondages. Mais le gouvernement ne basculera pas à gauche pour autant. Le bloc de droite resterait majoritaire avec au moins 66 députés, grâce à l’appoint des partis religieux. Les commentateurs se posent d’ailleurs la question de la stratégie de la coalition de gauche et du centre. Les trois partis envisagent-ils de forcer Benyamin Netanyahou à accepter un gouvernement d’union ? Comptent-ils se maintenir dans l’opposition contre un gouvernement de droite et d’extrême droite qui ne serait que faiblement majoritaire ? Pour le parti de gauche laïc, Meretz, la perspective de gouverner avec Netanyahou relève de l’« opportunisme politique ». Signe des temps, la question palestinienne est quasi absente du programme du Parti travailliste, qui s’attache davantage aux réformes sociales, espérant bénéficier de la vague de contestations qui a secoué Israël à l’été 2011. En revanche le Meretz déplore que « le mot “paix” soit dramatiquement absent » du programme du parti, et réclame l’abrogation des accords d’Oslo, qui ont, selon lui, « perdu toute légitimité aux yeux du public ».
Paradoxalement, la formation d’une coalition au centre pourrait être une aubaine pour le Likoud, qui la brandit comme une menace et fait des appels du pied aux électeurs de droite. « Voter pour un autre parti, menace Netanyahou, ne fait que renforcer la gauche. » En réalité, ce n’est pas l’opposition qui inquiète le Premier ministre. Son principal rival se trouve bien à sa droite. Le Foyer juif, parti ultranationaliste dirigé par le milliardaire Naftali Bennett, ancien chef de cabinet du Premier ministre, pourrait remporter jusqu’à 14 sièges, alors qu’il n’en dispose que de trois actuellement. Des sièges qui seraient pris au Likoud. La principale divergence entre le Foyer juif et le Likoud concerne la colonisation. Contrairement à Netanyahou, le mouvement de Naftali Bennett demande l’annexion de la zone C de Cisjordanie, qui représente, selon le découpage issu des accords d’Oslo, en 1993, plus de 60 % de ce territoire. Les quelque 400 000 colons tentent aujourd’hui de traduire leur influence de lobbyistes sur le terrain électoral. D’où l’âpre concurrence entre le Likoud et le Foyer juif. S’agissant des partis de la gauche anticoloniale, ils restent très minoritaires. Selon un sondage publié par le site Mako de la 2e chaîne de télévision, le Meretz obtiendrait cinq sièges, le Balad, parti judéo-arabe, en remporterait quatre – soit un de plus qu’actuellement. Enfin trois autres iraient au Hadash, qui vient de la mouvance communiste.