Biodiversité : Le loup s’installe en France
Dans son plan de gestion 2013-2017, le gouvernement réaffirme la stricte protection du canidé. Les écologistes sont rassurés et les anti-loup s’estiment entendus. Vers un apaisement ?
dans l’hebdo N° 1240 Acheter ce numéro
Le loup, par le dynamisme de son espèce, est en train de régler par lui-même la question de sa survie en France. Alors que l’on détectait sa présence dans le parc du Mercantour en 1992 pour la première fois sur le territoire national [^2] depuis qu’il avait été décimé dans les années 1930, on dénombre 250 loups vingt ans plus tard, dans 29 zones de présence permanente réparties sur 15 départements. Essentiellement dans l’arc alpin, puis le Jura, les Vosges, les Pyrénées et le Massif central. L’aire de répartition de l’espèce et sa population croissent de 25 % par an. « Une expansion qui concerne tous les pays européens où les loups se sont historiquement maintenus », avec « une stabilisation des attaques » (d’ovins) au sein des zones de présence, tentent de rassurer les ministères de l’Environnement et de l’Agriculture, qui viennent de présenter leur plan de gestion de l’espèce pour la période 2013-2017.
L’approche de ce plan marque un virage. ** Alors qu’il était surtout question de limiter l’impact de la présence de l’espèce sur l’élevage, l’enjeu est désormais « de construire une vision commune des moyens de cohabitation » avec le prédateur. Pour les pouvoirs publics, qui rappellent que « le loup est et restera une espèce strictement protégée », sa réinstallation sur le territoire français est un fait irréversible. Le plan, qui sera formellement adopté au printemps, prévoit un suivi accru des populations, plus d’efforts pour protéger les troupeaux et des dispositifs d’indemnisation simplifiés en cas d’attaque [^3], et surtout une augmentation du nombre maximal de « prélèvements » (tirs mortels) autorisés, « sans remettre en cause la dynamique de l’espèce ». En 2012, le quota était de 11 animaux [^4].
Surprise, le 5 février, quand la ministre de l’Environnement, en dehors de toute concertation, annonce une expérimentation baroque : la capture de loups dans onze parcs naturels régionaux dans le but de les « éduquer » pour les dissuader de revenir. Aux États-Unis, il semble que l’on ait ainsi détourné des carnivores des troupeaux en les accoutumant au gibier. « Même les éleveurs lèvent les yeux au ciel !, commente Jean-David Abel, convaincu d’une maladresse passagère. Qui peut croire qu’une espèce comme le loup se dresse ? »
En revanche, du côté de l’association Éleveurs et montagne, le compte n’y est pas. « Le ministère parle de consensus, je ne le vois pas, commente, désabusé, Yves Derbez, président. Nous continuons de réclamer un arrêt de la prolifération du loup. » Certes, le plan ne résout pas le problème du pastoralisme, et il faudra bien s’en occuper sérieusement, convient Jean-David Abel, « mais si le loup contribue parfois aux problèmes des éleveurs, il est loin d’en être la cause principale ».
[^2]: Retour naturel, à partir de l’Italie.
[^3]: Plus de 9 millions d’euros ont été consacrés à ces deux postes en 2011.
[^4]: Trois seulement ont été abattus.