EELV veut un changement de cap

Le mouvement écologiste hausse le ton contre le gouvernement, accusé de pratiquer une « gestion à courte vue ». En cause, « l’orientation économique » de François Hollande.

Michel Soudais  • 30 mai 2013 abonné·es

Le 16 mai, au cours d’une rencontre à huis clos, juste après sa conférence de presse, François Hollande avait invité les parlementaires de la majorité à « refaire de la politique ». Les écologistes d’EELV l’ont entendu, mais la motion critique adoptée ce week-end par leur conseil fédéral à la quasi-unanimité – il n’y a eu qu’un contre et quatre abstentions – n’a rien pour être à son goût. Ce texte appelle en effet à « une véritable réorientation des politiques menées par le gouvernement » et « demande un changement de cap rapide et significatif  […] afin de sortir de la politique gestionnaire à courte vue appliquée aujourd’hui ».

Pour le gouvernement, cette motion est une alerte. EELV avait prévu de faire le bilan de sa participation gouvernementale, fin août, lors de ses journées d’été. Si ce rendez-vous est maintenu, le texte adopté samedi donne déjà un aperçu de l’état d’esprit des troupes. « Les inflexions que l’on attendait ne sont pas venues ; il nous semblait donc nécessaire de marquer le coup », explique Mickael Marie, directeur de cabinet du secrétaire national, Pascal Durand. Dans un souci d’équilibre, le texte n’oublie pas de se féliciter des « avancées enregistrées » sur des « combats portés de longue date par les écologistes »  : mariage pour tous, report de l’objectif des 3 % de déficit, progrès dans la transparence des banques, création de la BPI, premières victoires à Notre-Dame-des-Landes, interdiction de l’exploitation des gaz de schiste, etc. Il déplore toutefois que « l’ensemble de l’appareil de l’État n’ [ait] pas encore évolué » à l’unisson du changement de gouvernement, pointant l’absence de renouvellement des pratiques des administrations publiques et « la pression technocratique ». Le texte met aussi l’accent sur « le maintien de l’arrogance de l’administration » qui contribue à « nourrir le rejet du politique ». Surtout, EELV souligne pas moins d’une dizaine de reculs ou de renoncements. La liste va de « la réduction du déficit budgétaire  [qui] semble constituer actuellement le principe supérieur de la politique impulsée par le président de la République et le Premier ministre » à l’absence de « volonté forte d’engager la transition énergétique », en passant par l’injuste répartition des efforts ( « augmentation de la TVA pour les ménages » ), ou encore « une diplomatie économique privilégiant la recherche des marchés ».

Afin de rassembler toutes les sensibilités du mouvement, le texte ne mentionne pas le TSCG, contre lequel le parti avait majoritairement pris position, ni l’ANI, sur lequel ses parlementaires, divisés, se sont abstenus. Néanmoins, « le parlement du mouvement valide toutes les critiques faites depuis quelques mois », se félicite Jérôme Gleizes. Y compris celles formulées par Cécile Duflot et Pascal Canfin, au sein même du gouvernement. Les deux ministres ont d’ailleurs fait connaître leur accord avec la motion adoptée, qui rappelle longuement les propositions d’EELV. Avec notamment un « infléchissement de la trajectoire budgétaire » de réduction des dépenses publiques pour relancer une politique d’investissement public « ambitieuse » dans « les domaines essentiels à la transition énergétique ». Le texte manifeste également la volonté d’EELV de relancer la discussion avec l’ensemble des formations de gauche, qu’elle « invite à se fédérer autour de ce changement de cap ». Une manière de revendiquer son droit à critiquer le gouvernement tout en étant dedans.

Politique
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