Guantanamo : l’ultime espoir pour les proches de Nabil Hadjarab
Après 108 jours de grève de la faim, Nabil Hadjarab est toujours suspendu aux tergiversations des politiques français et américains.
Nabil Hadjarab est détenu à Guantanamo depuis 12 ans. En 2007, les autorités américaines jugeaient que le jeune homme ne représentait « aucune menace » et ** le déclaraient libérable. Depuis, il réclame son retour en France, le pays qui l’a vu grandir. Mais Nabil est algérien, et comme la France a déjà accueilli deux ressortissants algériens libérés de Guantanamo en 2009, elle s’atermoie.
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Le 26 avril dernier, Maître Joseph Breham, son avocat français, déposait un référé-liberté auprès du Tribunal administratif de Paris. Rejeté. Mais, avec le bruit médiatique autour des grévistes de la faim de Guantanamo, il était étrangement sollicité quelques jours plus tard par le ministère des Affaires étrangères pour un « entretien informatif » sur la situation de son client.
Ce 16 mai, les deux conseillers de Laurent Fabius qui l’ont reçu lui suggèrent d’insister sur la voie judiciaire. En l’occurrence, le dépôt d’un nouveau référé-liberté plus argumenté. « Je pense que les autorités françaises voudraient voir Nabil Hadjarab sortir de Guantanamo, mais pour le moment, ils gagnent du temps, de façon à ne pas politiser le sujet » , commente l’avocat.
Parallèlement, conseil lui était donné de se rapprocher de l’administration Obama pour négocier une autorisation de « transfèrement ». Par l’intermédiaire de l’ONG Reprieve, il devrait prochainement rencontrer un représentant des autorités américaines à Washington.
L’espoir renaît
En dépit de l’annonce de la fermeture du camp dès son élection en 2008, le président des États-Unis s’est toujours abrité derrière l’inflexible opposition du Congrès américain pour se défausser. En décembre 2013, il promulguait même la National Defense Authorization Act (NDAA), une loi autorisant la détention militaire sans limitation et sans procès de tout « ennemi combattant » , perpétuant ainsi le concept de « guerre globale contre le terrorisme », préconisée par George Bush Jr.
Il se voulait plus conciliant, ce jeudi 23 mai, dans un discours sur la stratégie antiterroriste américaine. Tout du moins envers les prisonniers yéménites, majoritaires à Guantanamo, pour lesquels il prévoyait d’examiner « au cas par cas » le transfert au Yémen. **
Même si, à terme, la fermeture du centre de détention était évoquée, rien n’a été envisagé concrètement pour les détenus non yéménites déclarés libérables. Une position qui a cependant raffermi l’espoir d’une libération tant attendue pour la famille de Nabil Hadjarab.
Un état de santé très fragile
En grève de la faim depuis le 8 février 2013, le temps presse pour Nabil Hadjarab. Placé à l’isolement et nourri de force par ses geôliers depuis le 20 mars, son oncle rappelait en avril que « l’utilisation d’un tube nasogastrique pouvait causer des saignements sévères ». Aujourd’hui, son état de santé est très fragile.
Il y a deux semaines, son avocate américaine, Cori Crider de l’ONG Reprieve, a pu le rencontrer : « Nabil est si faible qu’il peut à peine lever la tête. En raison des lumières fluorescentes vives qui sont allumées dans leurs cellules, jour et nuit, il est obligé de porter des lunettes. Ces lunettes éclipsent maintenant son corps squelettique et ses yeux sombres » .
En février 2013, son oncle Ahmed lançait une pétition. À ce jour, elle a recueilli plus de 15 000 signatures. Ahmed espère ainsi que la mobilisation participera de la libération de son neveu. Et que la disposition de Barack Obama à fermer Guantanamo influera sur la volonté du gouvernement français à le rapatrier. Le 24 mai, Ahmed confiait aux équipes de Change.org : « La balle est maintenant dans le camp des autorités françaises, qui, je l’espère, vont accepter de laisser rentrer Nabil en France » . À suivre.
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