Trading à haute fréquence : Une régulation très loin des enjeux

Le gouvernement a sous-estimé les dangers du trading à haute fréquence dans la loi bancaire.

Thierry Brun  • 9 mai 2013 abonné·es

Interdire le trading à haute fréquence (THF) ? La France y a songé dans le cadre de la réforme bancaire adoptée par les députés en première lecture en février. Le ministre de l’Économie, Pierre Moscovici, a évoqué cette interdiction du THF, qu’il juge spéculatif et peu utile, indiquant qu’en 2011 « le trading à haute fréquence représentait plus de 60 % des ordres sur actions passés à la Bourse de Paris, pour environ 33 % des ordres donnant effectivement lieu à transaction ». Bercy souligne que cette activité contribue « occasionnellement » à la saturation des plateformes boursières, mais omet de préciser que le THF est à l’origine de nombreux krachs éclairs. Selon des données américaines, il y aurait eu pas moins de 18 520 krachs éclairs entre 2006 et 2011, soit 10 par jour… Le constat d’un désordre sans précédent des marchés financiers n’a pas été suivi de mesures politiques à la hauteur dans le projet de loi toujours en discussion au Parlement : l’interdiction du THF ne concerne que les seules banques et à condition qu’il s’agisse de transactions dites « taxables », soit à peine 20 % de cette activité. Les acteurs de la finance les plus actifs peuvent continuer de provoquer des mouvements aberrants. Pour l’ONG Finance Watch, « l’absence de réglementation menace le modèle même d’un système financier qui sert la société », et une révision de la réglementation européenne concernant les marchés d’instruments financiers, nommée MiFID 2, s’impose.

En fait, cette réforme présentée en 2011, qui vise à rectifier les conséquences de changements que l’Union européenne a décidés ces vingt dernières années, ne prévoit pas l’interdiction du THF. Certains pays membres y sont opposés, notamment les Pays-Bas et le Royaume-Uni. En outre, les travaux de révision, qui devaient s’achever en juin, ont pris du retard et sont loin d’aboutir. Lassée d’attendre, l’Allemagne a adopté en février une loi censée réguler cette activité. Les autorités de ce pays peuvent interdire le trading algorithmique en cas d’effet négatif sur les marchés… mais cette mesure n’empêchera pas les traders d’aller voir ailleurs.

Économie
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