Une majorité rétrécie

François Hollande a incidemment rejeté la gauche de la gauche dans le « camp d’en face ».

Michel Soudais  • 23 mai 2013 abonné·es

Ce n’est qu’une incise dans une phrase, mais ces quelques mots prononcés par François Hollande lors de sa conférence de presse en disent long. Sur la gauche, les rapports au sein de celle-ci, et sur l’état d’esprit du chef de l’État. Questionné sur la possibilité d’une ouverture en cas de remaniement, le président de la République a balayé l’idée. Il a déclaré en revanche ne voir « aucune raison de ne pas saisir une proposition, sous prétexte qu’elle vient du camp d’en face ». Avant de lancer : « Je ne demande pas d’indulgence de la part de l’opposition, je lui demande des propositions. Ça vaut aussi pour la gauche de la gauche, qui ne fait pas partie de la majorité. » La formule est expéditive. Elle n’a pas échappé à l’Humanité, qui la citait dans son éditorial, le lendemain, estimant qu’elle visait « les quatre millions d’électeurs du Front de gauche qui au second tour, le 6 mai 2012, apportèrent un soutien décisif » à François Hollande.

Jusqu’ici, pour caractériser leur relation avec le nouveau pouvoir, les dirigeants du Front de gauche avaient établi un distinguo subtil fondé sur la double nature des institutions. Ils admettaient ne pas faire partie de la majorité parlementaire, n’ayant pas eux-mêmes voté la confiance au gouvernement ; mais ils revendiquaient appartenir à la majorité présidentielle, puisqu’ils avaient appelé à voter pour François Hollande afin de chasser Nicolas Sarkozy. Une formule, utilisée à la rentrée tant par Jean-Luc Mélenchon que Christian Picquet ou Pierre Laurent, résumait la situation : « Nous sommes les ayants droit de la victoire », disaient-ils. Refusant de se situer dans l’opposition, ils concédaient toutefois être « opposés à la politique conduite par le gouvernement ». Ces subtilités volent aujourd’hui en éclats. Pour François Hollande, majorité présidentielle et parlementaire, c’est tout un. « La ligne, c’est le président de la République qui la fixe », affirmait-il le 7   mai dans un entretien à Paris Match. « Et il n’y en a qu’une, et une seule, au sein du gouvernement et de la majorité. » Réagissant à l’affirmation présidentielle, selon laquelle le Front de gauche ne lui ferait aucune proposition, Jean-Luc Mélenchon se dit « consterné ». « Que n’a-t-il lu le programme que nous avons défendu ? », s’agace le coprésident du PG. « Je lui ai proposé de changer de cap », rappelle-t-il également, avant de déplorer que le Président continue à s’obstiner dans « une politique qui nous amène à la récession ». Une politique qu’il n’hésite plus à qualifier « de droite dans bien des domaines ».

Politique
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