AlterTour : Dopés à l’alternative

Depuis le 19 juillet et jusqu’au 20 août, l’AlterTour parcourt la France à vélo pour défendre des idées neuves. Reportage.

Claude-Marie Vadrot  • 25 juillet 2013 abonné·es

Le départ du 6e AlterTour a été donné le 19 juillet à Autry-le-Châtel, dans le Loiret. Symboliquement, le peloton des altercyclistes a attaqué son périple devant le centre expérimental de maraîchage de Monsanto, installé dans la commune depuis trois ans. Départ face à des grilles fermées à titre préventif par la firme américaine, au point même que tous les fournisseurs et visiteurs se voyaient refuser l’entrée du centre. À l’intérieur, dans des serres où la température frôle les 40 °C depuis quelques jours, les ouvrières (intérimaires) n’ont pas eu le droit de venir jeter un coup d’œil à cette assemblée cycliste bon enfant. La gestion « américaine » y limite les pauses au strict minimum, et ce malgré la chaleur, avec interdiction d’apporter son eau ! Difficile de savoir ce qui se passe dans cet établissement essentiellement voué à des essais et à des fécondations manuelles sur des poivrons et des tomates. Officiellement, pas question «   pour l’instant   » d’essais transgéniques. Pourtant, il y a quelques semaines, les poivrons y ont été victimes d’un mystérieux virus qui a entraîné l’arrachage de milliers de plants. Et les responsables du centre interdisent désormais au personnel d’emporter des légumes récoltés dans les serres. Explication plausible : malgré les promesses officielles de Monsanto, qui jure abandonner ses projets en Europe, la société américaine redoute que poivrons et tomates puissent être analysés à l’extérieur et que les manipulations génétiques en cours soient découvertes.

En faisant halte, au cours de la première étape, devant la centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly, les cyclistes de l’AlterTour ont fait connaissance avec des gendarmes au moins aussi nombreux qu’eux. Interdiction d’approcher les grillages de l’installation dans laquelle les coureurs avaient pourtant annoncé qu’ils ne tenteraient pas de pénétrer. Intimidations habituelles, y compris un relevé systématique et illégal de leurs adresses et identités. Avec en prime les menaces des agents de la société de sécurité Segur, prétendant empêcher la prise de photographies. C’est ce nucléaire, le secret des recherches et le massacre programmé de l’agriculture paysanne que les altercyclistes veulent dénoncer au cours de leur périple. Des thèmes qui ont fait l’objet du débat inaugural, mené sur l’aire de départ, dans le jardin communautaire des Hubbits, par Pierre-Henri Gouyon, professeur au Muséum national d’histoire naturelle. Une discussion autour d’un feu de bois où tous les auditeurs et participants se sont montrés convaincus de la nécessité de préserver la biodiversité afin de contrer les multinationales comme Monsanto et les grandes firmes agroalimentaires. Des auditeurs avides aussi de solutions et de moyens de résistance. Sur ce point, les propositions restent cependant plus évasives que la dénonciation, comme l’ont montré les débats organisés le dimanche par les Faucheurs volontaires, lesquels fêtaient leur dixième anniversaire à Bouzy-la-Forêt, à l’occasion de la première journée de repos. Des faucheurs venus d’Europe et d’Afrique ont expliqué eux aussi leurs combats et leurs difficultés.

Tout au long de cet autre « Tour », qui s’achèvera le 20 août à l’altervillage d’Attac de Rochejean (Jura), les trente à cinquante coureurs – selon les jours – découvriront et mettront en valeur les  « alternatives à tous les dopages dont est victime notre société ». Qu’il s’agisse de biodiversité, d’agriculture industrielle, de sport, de santé, des gaz de schiste ou de la société de consommation, ils organiseront des débats à chaque étape. Parcourant de 40 à 80 kilomètres par jour sur un rythme volontairement lent, ils seront accompagnés d’une voiture-balai et d’une remorque technique pouvant offrir des vélos à ceux qui veulent rejoindre le peloton pour une ou deux journées. Sur chaque bicyclette, des fanions et des pancartes racontent les revendications et les champs du possible. La vie du cortège est à la fois pittoresque, autogérée et joyeuse. Chacun expliquant ses aspirations à un autre quotidien et la nécessité, l’urgence même, de résister à toutes les tentations d’une société de consommation « où l’offre conditionne la demande à grand renfort de publicité ». Ce mini-tour de France des idées neuves rencontre un accueil plutôt sympathique, mais il se voit souvent renvoyé à la question du chômage. Beaucoup des membres de la caravane et du public dénoncent l’impuissance écologique de la gauche ou de la droite, et affichent leur scepticisme face aux discours des Verts ; même si la caravane est accompagnée par l’ancienne parlementaire écolo Anny Poursinoff…

Écologie
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