Duflot oublie le loyer des HLM
La loi de la ministre du Logement ne limitera pas l’inflation des loyers des HLM. Pourtant, ceux-ci ont augmenté de 30 % en 10 ans selon une étude de l’INSEE.
Cécile Duflot aurait-elle oublié le logement social ? La future grande loi de la ministre du Logement n’encadrera pas les loyers des HLM. Pourtant, ces derniers ont bondi de 30 % entre 2000 et 2011 selon une étude de l’INSEE publiée ce mardi 9 juillet 2013. « La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) n’imposera une limite que pour le parc privé des zones ‘tendues’ dans les agglomérations de plus de 50 000 habitants » , regrette Eddie Jacquemart, le président de la Confédération nationale du logement (CNL).La hausse constatée est sensiblement identique à celle qui a eu lieu dans le secteur dit « libre » sur la même période (32 %). Vivre dans un HLM reste avantageux pour les locataires : ils disposent d’un loyer plus bas de 261 euros et d’une habitation plus grande de 2,5 m² par rapport à un logement similaire dans le secteur privé.
Cette possibilité profite aux ménages les moins aisés : en 2006, les 40 % des ménages les plus modestes représentaient plus de 60 % des locataires de HLM. Cependant, ceux qui bénéficient de ces logements ne cessent de perdre du pouvoir d’achat, car leurs loyers peuvent être révisés chaque année. La hausse est limitée, mais, en 2013, elle peut tout de même atteindre 2,15 % (voir encadré).
L’Etat se désengage
Selon Eddie Jacquemart, cette protection n’est pas suffisante : « Imaginez par exemple la situation d’un fonctionnaire. D’un côté son salaire est gelé depuis 4 ans et de l’autre on peut lui imposer une telle hausse sur son loyer » .
Selon les associations, cette augmentation est aussi due à une certaine inaction politique. « Le problème de fond, c’est le désengagement de l’Etat, qui, depuis quelques années, réduit ses aides à la pierre » , assure Eddie Jacquemart. Même explication de la part de Laure Bourgoin, chargée de mission logement à la CLCV : « Ces aides sont en voie de disparition. Cela entraîne une hausse du coût de la construction. » Le manque à gagner est ensuite répercuté par les bailleurs, « surtout sur le loyer de départ », ajoute la chargée de mission.
Chaque année, les loyers peuvent être révisés, en cours de bail. Le nouveau loyer ne peut pas dépasser un loyer plafond fixé par une convention signée entre l'Etat et le bailleur. Ce loyer plafond est lui-même révisable annuellement, mais doit être indexé sur l'indice de référence des loyers (IRL).
L'IRL est calculé à partir de la moyenne de l'évolution des prix à la consommation sur les douze derniers mois (hors tabac et hors loyers). Le taux à ne pas dépasser est ensuite fixé par la loi de finances. Cette année, l'évolution des loyers de HLM en cours de bail ne peut pas dépasser 2,15%. Selon Eddie Jacquemart, l'IRL devrait être remplacé par un indice plus juste et « plus proche de l'évolution des salaires » .
Le gouvernement partage cette dernière ambition : 150 000 logements sociaux devraient sortir de terre chaque année jusqu’en 2015. La promesse, déjà formulée en mars par François Hollande, a été réitérée par les ministres Cécile Duflot et François Lamy lors de la signature d’un pacte d’objectifs et de moyens entre l’Etat et le mouvement HLM. Autrefois fixé à 20 %, le taux minimum de logements sociaux dans les villes de plus de 3 500 habitants a par ailleurs été réévalué à 25 % par une loi du 18 janvier 2013.
Ces mesures ne satisfont pas Eddie Jacquemart, qui les juge inefficaces : « Les premiers actes de la majorité étaient intéressants, mais cela ne devait être qu’un début. Le problème c’est que la fin ne vient jamais. » Laure Bourgoin considère quant à elle que la hausse des loyers ne doit pas être l’ « arbre qui cache la forêt ». « Les charges, qui ne sont pas plafonnées, augmentent elles aussi. » Eau, électricité, services en tout genre : la facture ne cesse de s’alourdir pour ceux qui vivent dans des logements HLM. Face às une future loi qu’il juge lacunaire, Eddie Jacquemart demande plus d’actions concrètes de la part du gouvernement : « Nous avons été patients. Mais nous allons bientôt changer de ton. »
Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.
Faire Un Don