La grande diversion
À l’approche du 10 septembre, le gouvernement tente de déminer le terrain.
dans l’hebdo N° 1266 Acheter ce numéro
Jean-Marc Ayrault s’est employé à faire oublier la réforme des retraites et les régressions des précédentes, quelques jours avant le mouvement social prévu le 10 septembre à l’appel de quatre syndicats (CGT, FO, FSU et Solidaires). Les 26 et 27 août, pour déminer le terrain, la série de concertations bilatérales avec les partenaires sociaux a été l’occasion de présenter des « hypothèses de travail ». Le gouvernement s’oriente vers une réforme moins provocatrice que la remise en cause générale contenue dans le rapport explosif de Yannick Moreau, remis en juin au Premier ministre. La hausse de la durée de cotisations pour une retraite à taux plein n’est pas envisagée avant 2020 et un « compte-temps » pour les métiers pénibles a été confirmé. Le Medef a aussi trouvé son compte dans les pistes gouvernementales. Pierre Gattaz s’est félicité d’avoir obtenu une « ouverture » avec la « baisse du coût du travail » en contrepartie de « dixièmes de point de cotisations supplémentaires » pour « régler quelques problèmes de retraites ».
Les entretiens bilatéraux ont cependant déçu la CGT. Ils « ont pour effet d’éluder le débat nécessaire sur la part des richesses produites par les entreprises consacrée au financement de la protection sociale », a réagi Thierry Lepaon, secrétaire général, dans une lettre remise à Jean-Marc Ayrault à l’issue de la concertation. Pour les syndicats qui mobiliseront leurs troupes le 10 septembre, la réforme s’inscrit dans le prolongement des précédentes. Avec la « stratégie d’essaimage » de Jean-Marc Ayrault, « il y en aura pour tout le monde, qu’on soit actif, qu’on soit retraité », a prévenu Thierry Lepaon. Par exemple, avec l’hypothèse d’une augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG), « le gouvernement fera essentiellement payer les salariés, puisque la CSG est générée à plus de 70 % par les revenus salariaux. C’est donc sur les salariés que pèsera le poids de l’ajustement », explique Pierre Khalfa, coprésident de la Fondation Copernic. Pour résoudre le problème de financement à court terme des retraites, les syndicats souhaitent une augmentation des cotisations patronales et rappellent que les dividendes versés par les entreprises ont représenté 3 % du PIB dans les années 1980, et qu’ils en représentent aujourd’hui plus de 9 %, largement de quoi financer les retraites, sans nuire à la compétitivité…