Et les droits de la défense ?
Le 17 septembre, des organisations opposées à l’ouverture de deux salles d’audience dans la zone aéroportuaire de Roissy organisaient une visite.
dans l’hebdo N° 1270 Acheter ce numéro
Le Mesnil-Amelot (77). Lorsque le car affrété par les organisations de défense des droits et des migrants [^2] dépasse l’arrêt des bus 701 et 702, Clémence Richard, de la Cimade, prévient : « D’ici, il faut encore marcher dix minutes vers la sortie du village pour arriver au centre de rétention. » À proximité de l’abribus, aucun panneau d’indication. « Même les GPS se perdent », souffle quelqu’un dans le car. Quand le bâtiment apparaît sur la gauche, appareils photos et caméras se collent aux vitres. C’est le plus grand centre de rétention administrative (CRA) de France, avec ses 240 places. Il est long, plat, angulaire et entouré de grillages. Dans le fond, des avions survolent une campagne sans âme. C’est le bout des pistes de Roissy.
Laurent El Ghozi , président de la Fnasat et cofondateur de Romeurope.
« Habiter à coté d’un bidonville, cela peut être insupportable, quelles que soient ses opinions politiques. C’est avoir sous les yeux une misère intolérable et des comportements liés à cette misère. […] Le droit commun doit s’appliquer à tout le monde, il n’y a aucune raison de créer des droits spécifiques ni des discriminations particulières. […] Les propos anti-Roms sont relayés sans limites ! Plus on déplace de terrains et plus on multiplie les exaspérations et les risques de délinquance ou de mendicité. C’est la politique menée et son échec manifeste qui favorisent le développement de propos extrêmes.
Il n’y a pas non plus d’affichage politique du gouvernement pour dire : les Roms sont des ressortissants européens, la France doit les accueillir. Quel message livre le ministre de l’Intérieur quand il dit : “Ils n’ont pas vocation à rester en France”, alors que nombre d’entre eux sont chez nous depuis des années ? »
Tout le monde se retrouve devant l’annexe du TGI de Bobigny au cœur du Roissypole. Et rebelote. Là, la salle d’audience a été construite contre la Zapi. En haut, les chambres, en bas, le tribunal. Les avocats s’étranglent. « Où allons nous recevoir les familles ?, lance l’une. Sur ce banc dans ce couloir ? Comment contacter les interprètes ou réclamer un arbitrage ? C’est beau, c’est neuf, c’est technologique, mais que deviennent les droits de la défense ? » Dans le car qui revient à Paris, Stéphane Maugendre rappelle que la Commission nationale consultative des droits de l’homme s’est prononcée contre ces annexes. Le Conseil national des barreaux aussi. Les déclarations d’élus se multiplient : Hélène Flautre (députée européenne EELV), Michel Billout (sénateur PC), Sergio Cornonado (député EELV) et Hélène Lipietz (sénatrice EELV). Cette dernière, qui est du voyage, clame : « Ces salles sont un héritage des lois scélérates de Nicolas Sarkozy. Pourquoi ce traitement à part ? Nous sommes toujours l’étranger de l’autre… »
[^2]: L’Anafé, l’ADDE (Avocats pour la défense des droits des étrangers), le Gisti, la Cimade, la Ligue des droits de l’homme, le réseau RESF, le Syndicat de la magistrature (SM), le Syndicat des avocats de France (SAV) et l’Union syndicale des magistrats administratifs (Usma)
Affaire de Nice, Roms... La République bafouée : Entretien avec Henri Leclerc