Du calme (plat)
Philippe Poutou se mélangeait avec la FNSEA et le Medef pour en finir avec la « confusion »…
dans l’hebdo N° 1276 Acheter ce numéro
J’ai donc arrêté de fumer – un peu plus tard que prévu, parce que bon, n’a beau être de gauche : c’est quand même pas évident de passer d’un seul coup de 489 cigarettes (par jour) à un (seul) patch. (Je glisse ici sur le substitut électronique from outter space qui allait soi-disant [selon mes potes passé[e]s par cette épouvantable épreuve] m’aider à oublier les autres – les vraies clopes qui font de la vraie fumée : la triste vérité est que ce truc me fait tousser comme un tubard lémanique circa 1923.)
Bien évidemment , j’ai un peu peur de replonger : quand je vois ce qui est par exemple arrivé au pauvre Jean-François Copé – qui avait, lui, promis d’arrêter la langue de bois, et qui a très gravement repiqué au truc au bout de même pas cinquante-cinq minutes –, je me dis que le sevrage est vraiment une discipline délicate.
Mais le plus flippant est que je me sens vraiment ralenti : écrire une phrase entière sans fumer peut me prendre un certain nombre de semaines, et là, tout de suite (et si du moins tout se passe comme je l’espère), tu ne t’en aperçois pas forcément, mais c’est parce que j’ai commencé à écrire ce billet il y a plusieurs mois, pour être sûr de le rendre à temps – et parce que, par un double surcroît de précaution, juste avant de le finir, j’ai mis à plein volume le dernier album de Motörhead, Aftershock, qui n’est pas exactement une compilation de tarentelles, et j’ai avalé deux tubes de Guronsan. Mais, globalement, je sens bien que je suis terriblement diminué. Pas plus tard qu’hier après-midi, pris d’une curiosité malsaine, je me suis connecté sur le site de BFM-TV pour voir comment se passait la manif de droite de Quimper, et je suis tombé sur le pauvre Philippe Poutou (L3P), qui était lui aussi là-bas et qui expliquait en substance qu’il se mélangeait dans le même défilé que la FNSEA et le Medef pour en finir avec la « confusion » – mais je n’ai même pas crié : j’ai gardé pour moi ce que m’inspirait L3P, en vérifiant tout de même que mon patch ne s’était pas décollé.
Puis, quelques heures plus tard, j’ai lu que Jean-Marc Ayrault était tàfait disposé à recevoir des représentants des « bonnets rouges » pour envisager avec eux les moyens de leur donner du plaisir – comme il fait à chaque fois que plus de trois excité(e) s de droite se réunissent pour crier leur mécontentement [^2]. Et derechef : je me suis tenu coi, alors qu’au temps béni où je ne m’éloignais jamais de plus de cinquante centimètre de mon paquet de cigarettes, je te prie de croire que je me serais répandu pour beaucoup moins que ça en abominables imprécations, type l’appel-de-Cthulhu. Et comme je voudrais pas non plus devenir trop hippie, je vais faire le test ultime : si j’arrive à visionner sans rien dire Finkielkraut chez Ruquier, je crois que je vais recommencer à fumer.
[^2]: Mais nous, t’as vu : quand on défile à des centaines de milliers contre la réforme des retraites, il n’en a strictement rien à foutre et ne planifie nullement de nous satisfaire – et ce n’est pas étonnant, puisqu’il est « socialiste ».
Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.