Bruxelles réduit les gaz
Les décevantes propositions de la Commission européenne pour limiter l’effet de serre préparent un recul des ambitions de l’Union.
dans l’hebdo N° 1288 Acheter ce numéro
Une réduction de 40 % des gaz à effet de serre à l’horizon 2030 par rapport à leur niveau de 1990. L’annonce centrale du nouveau paquet climat-énergie de l’Union européenne, présenté la semaine dernière par Bruxelles, déçoit fortement les milieux écologistes. Un premier paquet, adopté en 2009, fixait trois objectifs pour 2020 : 20 % de baisse des émissions, 20 % d’énergies renouvelables et 20 % de réduction de l’intensité énergétique [^2]. Si l’objectif « émissions » devrait être atteint (-16 % acquis en 2011), c’est plus douteux pour les renouvelables (12,7 % en 2010) et improbable pour l’intensité énergétique (objectif non contraignant, contrairement aux autres). Résultat moyen pour une ambition trop modeste : il faudrait avoir réduit de 80 % ou plus les émissions en 2050 pour avoir une chance de limiter à 2 °C d’augmentation la dérive des températures. Le nouveau paquet rate l’occasion de corriger la trajectoire : au regard des rapports scientifiques, il aurait fallu afficher jusqu’à 60 % d’émissions en moins.
Pour les renouvelables, la cote 2030 de la Commission européenne passe à 27 %, soit une frileuse prolongation de la tendance actuelle. De plus, le projet abandonne le principe, en vigueur dans le premier paquet, d’une déclinaison contraignante de l’objectif pays par pays. Quant à l’intensité énergétique, le chantier est en pause, dans l’attente de la révision, cette année, de la directive européenne qui en traite. Et le marché de quotas d’émission de carbone, inopérant en raison d’objectifs laxistes, ne sera que timidement réformé. Pour Attac, Greenpeace, les parlementaires écologistes et la plupart des observateurs déçus, c’est signé : Bruxelles s’est pliée aux injonctions des industriels des énergies fossiles, lesquels demandaient en octobre dernier une pause dans le développement des renouvelables. Le paquet doit être discuté à la fin du mois de mars par les chefs d’État des Vingt-Huit. Il définira leur position pour la conférence mondiale sur le climat de 2015, au Bourget, où l’on attend un accord ambitieux sur la réduction des émissions. L’Union européenne, qui s’octroie depuis près de vingt ans le titre de locomotive de la lutte contre le dérèglement climatique, s’apprête-t-elle à rentrer dans le rang ?
[^2]: La quantité d’énergie consommée pour produire un point de PIB.