Israël : la peur du boycott
Le gouvernement israélien et le patronat prennent conscience de l’ampleur du mouvement international en faveur de la campagne BDS.
dans l’hebdo N° 1290 Acheter ce numéro
«BDS » pour « Boycott, désinvestissement et sanctions » : voilà donc les trois lettres qui font peur au gouvernement israélien. C’est même un début de panique qui s’empare du Premier ministre, Benjamin Nétanyahou, qui, dimanche, a réuni en urgence trois de ses ministres pour discuter des moyens de lutter contre le boycott.
De façon symptomatique, ce sont les ministres les plus favorables à la colonisation qui étaient convoqués : Avigdor Lieberman (Affaires étrangères), Naftali Bennett (Économie), représentant direct des colons, et Youval Steinitz (Affaires stratégiques). Les plus modérés, comme la ministre de la Justice, Tzipi Livni, avaient été soigneusement tenus à l’écart. Il ne s’agit donc pas de renoncer à la colonisation mais d’entamer une campagne de propagande comme Israël en a le secret. « Aucune manipulation médiatique ou de “Hasbara” [relations publiques, NDLR], aussi bien financée soit-elle, ne pourra contrer un tel mouvement en expansion mondiale », a répliqué par avance Hanane Achraoui, dans une tribune publiée par le quotidien Haaretz. Pour la dirigeante palestinienne, membre du Comité exécutif de l’OLP, le boycott est « une forme de résistance responsable et non-violente [qui] montre que l’occupation a un prix », et qui doit « inciter la société civile israélienne à mettre son gouvernement face à ses responsabilités ». Parmi les plus inquiets, il y a les patrons israéliens dont certains, réunis au sein du mouvement Breaking the Impasse, ont récemment appelé le gouvernement à faire la paix avec les Palestiniens. Ces débats se mènent alors que le secrétaire d’État américain, John Kerry, intensifie ses efforts pour parvenir à un accord d’ici à la fin du mois d’avril. Des démarches qui ont bien peu de chances d’aboutir, les États-Unis n’ont même pas réussi à obtenir d’Israël un gel de la colonisation. John Kerry a récemment été la cible d’attaques très virulentes de la droite gouvernementale israélienne pour avoir fait valoir qu’en cas d’échec de son plan, la menace d’un boycott serait importante.
En fait, on sait peu de chose pour l’instant du plan Kerry, sinon qu’il prévoirait le maintien de l’armée israélienne sur la rive du Jourdain pendant dix ou quinze ans, et le non-démantèlement de 75 % à 80 % des colonies. Ce qui n’est pas acceptable pour le Président palestinien, Mahmoud Abbas, qui demande un retrait israélien sur cinq ans et le positionnement d’une force de l’Otan le long du Jourdain et partout où cela serait nécessaire en Cisjordanie. Commentaire du vice-ministre israélien des Affaires étrangères, Zeev Elkin, « il [Mahmoud Abbas] ne veut pas nous jeter à la mer immédiatement, mais seulement un peu plus tard ».