Merci, Alain Finkielkraut
S’il y a un mot qui résume parfaitement sa pensée, c’est bien celui-ci : « subtilités ».
dans l’hebdo N° 1299 Acheter ce numéro
Je m’en voudrais – beaucoup – de ne pas saluer ici l’insertion dans l’Académie française, le 10 avril dernier, de M. Finkielkraut, « philosophe et écrivain ». Je sais – comme toi – que son élection, où ses innombrables ami(e)s de l’éditocratie ont fait comme s’il y avait un véritable suspense, était, bien évidemment, jouée d’avance : l’hypothèse selon laquelle il aurait pu ne pas être admis au sein de cette institution (très majoritairement) blanche et notoirement conservatrice était à peu près aussi crédible que, disons, l’idée selon laquelle le journal de 20 heures de France 2 serait autre chose qu’une chambre d’écho libérale.
Mais tout de même : la performance n’est pas négligeable, et je voudrais, si tu permets, reprendre, pour la saluer, les mots de l’excellente Aurélie Filippetti, ministre « socialiste » de la Culture (et de la Communication), d’après qui M. Finkielkraut est – selon la teneur du communiqué qu’elle a diffusé après l’élection susdite – « un essayiste de talent qui mesure tout l’impact des subtilités des expressions et des concepts de notre langue pour enrichir la réflexion commune ».
Car, en effet, s’il y a un mot qui, entre tous, résume parfaitement parfaitement la pensée (et les travaux) de M. Finkielkraut, c’est bien celui-là, et aucun autre : « Subtilités ». Et les siennes (de subtilités – ça serait bien que tu suives, steuplaît) sont d’autant plus frappantes que d’autres que lui (dont, par pudeur, je tairai les noms), moins attentifs sans doute à la qualité de leur(s) apport(s) à (l’enrichissement de) notre « réflexion commune » (où à ne blesser personne par des proférations trop nettement connotées), se laissent aller, depuis le début des années 2000, à des déclamations franchement (le)pénibles. Je pense notamment aux clercs de médias qui, débondés peut-être par un environnement où l’ « anticonformisme » consiste désormais à exhiber publiquement ses phobies, vont psalmodiant que ça serait quand même bien que Fatima, 15 ans, retire son foulard islamiste quand elle franchit le seuil du collège Pablo-Neruda – ou si qu’on souhaite vraiment un « Munich de l’école républicaine », et que, profitant de nos lâchetés, elle (Fatima, donc, je te répète que tu dois mieux suivre) envahisse la Pologne ? Ou à ceux qui – autre exemple, non moins navrant – trouvent (et disent, haut et fort) que tous ces Reunois, dans l’équipe de France de football (ou sur ce joli marché de la ville d’Évry, dans l’Essonne), c’est pas du tout que je sois raciste, mâme Dupont, mais tout de même : convenez-vous pas, trenous, que ça en fait un peu beaucoup ? (Et qu’un peu de blanc parmi cette affolante négritude aurait quelque chose de profondément rassurant?)
De mon point de vue, je le déclare ici sans plus tergiverser : ces gens manquent singulièrement de mesure dans leur usage des inépuisables « expressions et des concepts de notre langue ». Alors que M. Finkielkraut, hein ? On peut certainement lui reprocher beaucoup de choses, mais ça, non. Qu’il en soit ici remercié.
Sébastien Fontenelle est un garçon plein d’entrain, adepte de la nuance et du compromis. Enfin ça, c’est les jours pairs.