Deux femmes à la conquête des 12 %
En Massif central-Centre, Clarisse Heusquin (EELV) et Corinne Morel Darleux (Front de gauche) ont leurs chances. Portraits.
dans l’hebdo N° 1304 Acheter ce numéro
Vingt-cinq listes, cinq de plus qu’en 2009, pour seulement cinq sièges à conquérir : la région Massif central-Centre, étirée du Puy-en-Velay à Dreux, est la plus disputée des circonscriptions pour le scrutin européen du 25 mai. Pour envoyer au moins un député à Strasbourg, il faudra recueillir 12 % des voix. Pari difficile mais pas impossible pour EELV, qui avait élu Jean-Paul Besset en 2009 avec 13,6 %. Mais les écologistes, tractés par Daniel Cohn-Bendit, avaient le vent en poupe, et le député sortant ne se représente pas. C’est Clarisse Heusquin, 26 ans et benjamine des têtes de listes EELV, qui vise sa succession. Jouable aussi pour le Front de gauche, mené par Corinne Morel Darleux (PG), plus expérimentée, mais dont c’est la première grosse campagne électorale. En 2009, le cumul des scores du parti et du NPA, sans liste dans la région et qui soutient le Front de gauche en 2014, représentait 13,5 %. Les deux candidates se sont croisées le 20 mai lors d’un débat télévisé entre têtes de liste du Massif central-Centre.
Génération Erasmus
Comme en 2009, Europe décroissance, réunion du Mouvement des objecteurs de croissance (MOC) et du Parti pour la décroissance (PPLD), présente des listes pour le scrutin européen dans cinq régions (Ouest, Nord-Ouest, Île-de-France, Est, Massif central-Centre) [^2]. Appelant à une rupture « radicale », ces listes revendiquent la souveraineté monétaire, la souveraineté alimentaire, l’opposition aux traités commerciaux de libre-échange, l’abandon de la politique de mégapoles, une transition énergétique décisive, la sortie d’urgence du nucléaire, la maîtrise et le juste partage des ressources au niveau local.
[^2]: Il faut télécharger les bulletins sur Internet et les imprimer : decroissance-elections.fr
Renverser la table
Saint-Pierre-des-Corps, Belleville-sur-Loire, Orléans, Clermont-Ferrand – « Plus de 650 personnes » –, une nouvelle étape tous les deux ou trois jours et 15 heures quotidiennes sur le pont « mais boostée », assure Corinne Morel Darleux. « Ça me dépasse, mais on trouve l’énergie parce qu’être tête de liste est une responsabilité collective et qu’il y a la possibilité de gagner. » Si elle est élue, la Drômoise démissionnera de son mandat de conseillère régionale… en Rhône-Alpes. Faire campagne en Massif central-Centre ? « Ce découpage en grandes régions n’a pas de sens. D’ailleurs, François Hollande s’est engagé à revenir à une seule circonscription nationale. Et puis je suis à l’aise avec les questions rurales, l’écologie politique est très présente dans la campagne – pesticides, OGM, perte de biodiversité, transition énergétique… », affirme la secrétaire nationale à l’écosocialisme du Parti de gauche. Une « belle campagne, se félicite la candidate, je suis très bien entourée ». Elle a souhaité multiplier les tables rondes avec des cheminots ou des sous-traitants du nucléaire, ces sorties d’usine où l’on risque moins l’entre-soi qu’en meeting de soirée. « On parle du fond. Défense des services publics, poids de la règle des 3 % de déficit budgétaire, concurrence. On arrive toujours à relier les préoccupations nationales et l’échelon européen. » Martine Billard, coprésidente du Parti de gauche, salue son dynamisme et son pouvoir de conviction – « Elle a réussi à faire l’unité du Front de gauche sur son nom. » Troisième de liste dans le Sud-Est en 2009, Corinne Morel Darleux constate de la désillusion. « Les gens ont vu leur situation s’aggraver, ils ne marchent plus quand on leur vend une Europe qui protège. Mais, plus que de la désaffection, c’est le mécontentement qui les anime. » La candidate affiche en clair la critique de cette Europe libérale, avec sa camionnette étiquetée « La belle colère ». « Il faut convaincre que la pente n’est pas à la résignation ou à l’adhésion au Front national, et que l’espoir, c’est “renverser la table”, sortir des traités européens, bloquer le partenariat transatlantique Europe-États-Unis, désobéir à cette Union qui se moque du quotidien des gens ! Cette colère, je la partage. » Sortir de l’Europe, de l’euro ? « Très étonnée ! Je ne l’ai pas entendu revendiquer une seule fois ! »