La torture «en plein essor»
La torture n’est pas de l’histoire ancienne. Elle ne se cantonne pas aux zones de guerre. A l’occasion du lancement de sa campagne « Arrêtons la torture », Amnesty International publie un état des lieux de la torture à l’échelle mondiale. Alarmant.
Pour lui extorquer des aveux sur sa possible implication dans un trafic de drogue, des soldats en civil ont détenu Miriam López Vargas une semaine. Violée trois fois. Asphyxiée. Electrocutée. Trois années ont passé depuis, aucun de ses tortionnaires n’a été traduit en justice.
Cette femme de 31 ans, mère de quatre enfants, est Mexicaine mais elle pourrait être Marocaine, Nigériane ou même Américaine. Le rapport d’Amnesty International qui transmet son témoignage met en évidence l’ampleur de la torture, encore aujourd’hui.
Trente ans après l’adoption historique de la Convention contre la torture par l’ONU, la lutte contre les traitements inhumains est toujours d’actualité.
«Trente ans d’engagements non tenus»
Au cours des cinq dernières années, l’ONG a dénombré des cas de torture et de traitements inhumains dans 141 pays, dont 79 des 155 États qui ont ratifié la Convention des Nations unies en 1984. Exceptions ou dérapages dans certains États, cette violation des droits humains est une pratique généralisée dans d’autres. «La torture est non seulement toujours pratiquée, mais elle est même prospère dans de nombreux pays à travers le monde» , explique Geneviève Garrigos, secrétaire générale d’Amnesty International.
«Depuis 2001, la torture est utilisée au nom de la lutte contre le terrorisme. Cette forme de justification est lourde de conséquences… Dans le monde entier des gouvernements font preuve d’hypocrisie face à la torture. Ils l’interdisent à travers la législation mais l’encouragent dans la pratique.»
L’organisation lance ce mardi 13 mai la campagne «Stop torture» qui durera deux ans. Elle sera axée sur cinq pays où elle estime pouvoir amener des changements rapides et exemplaires : le Mexique, les Philippines, le Maroc et le Sahara occidental, le Nigéria et l’Ouzbékistan. Mais ces cinq priorités ne sauraient occulter l’étendue du problème : la torture est encore une pratique répandue à travers le monde.
Les résultats du sondage de l’institut Globescan, réalisé à la demande d’Amnesty, sont pour le moins alarmants. Sur 21 000 personnes interrogées, réparties dans 21 pays, près de la moitié (44%) craignent d’être torturées en cas d’incarcération.
Abjectes, les méthodes de torture sont utilisées contre les personnes suspectées de crimes ou de terrorisme, contre les dissidents et opposants politiques. Mais aussi contre les minorités, les femmes ou les jeunes. Parfois arrêtés au hasard, comme en Egypte où de plus en plus de témoignages révèlent l’usage massif de la torture et de l’humiliation sexuelle par les autorités.
En 2014, lutter contre la torture est encore une urgence.
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