Parutions de la semaine
dans l’hebdo N° 1303 Acheter ce numéro
Une si vive révolte
Jean Baubérot, préface d’Edwy Plenel, éd. de l’Atelier, 256 p., 21 euros.
L’œuvre de Jean Baubérot est largement reconnue et louée au-delà même de nos frontières. Mais on connaît moins le parcours engagé du fondateur de la sociologie de la laïcité, laïque protestant de gauche, révolté par le conformisme social de la société française des années 1950 et 1960, qui entra en politique contre la guerre d’Algérie et le colonialisme français, avant de s’enflammer pour Mai 68. Ce livre, autobiographique, retrace donc la vie de ce grand spécialiste de la laïcité à la française, se voulant aussi « le portrait d’une génération de femmes et d’hommes qui n’ont pas sacrifié leurs idéaux à l’ivresse du pouvoir et de leur carrière ». Un beau récit.
Une vie contre une autre
Échange de victime et modalités de survie dans le camp de Buchenwald
Sonia Combe, Fayard, 336 p., 19 euros.
Dans son roman autobiographique le Mort qu’il faut, Jorge Semprún raconte comment, inquiété par la Gestapo à Buchenwald alors qu’il faisait partie de la résistance clandestine du camp, il passa une nuit parmi les cadavres afin d’échapper aux SS qui étaient après lui. Il venait là de changer d’identité en se faisant passer pour mort. Cette pratique pour survivre fut utilisée par les déportés les plus engagés – au détriment des autres, de fait sacrifiés. L’historienne Sonia Combe s’est plongée plusieurs années dans les archives de Buchenwald, la littérature mémorielle des anciens déportés (David Rousset, Imre Kertész, Semprún…) et de nombreux témoignages pour mettre en lumière ce pan peu connu de l’histoire de la déportation, exemple particulièrement dérangeant de ce que Primo Levi appelait la « zone grise ». L’historienne se garde de porter un jugement moral, mais s’interroge sur l’éventuelle « reconfiguration des mémoires » aujourd’hui en cours. Passionnant.
L’Utopie
Norbert Elias, éd. par Quentin Deluermoz, traduit de l’allemand par Hélène Leclerc et de l’anglais par Delphine Moraldo et Marianne Woollven, La Découverte, 160 p., 16 euros.
Inédits en français, ces textes furent écrits par Norbert Elias au cours des années 1980. À l’heure où les idéologies et les utopies finissaient d’avoir très mauvaise presse, le sociologue allemand proposait une analyse de l’utopie en l’appréhendant – réinsérée dans son contexte de production – à la fois comme outil et comme objet. À partir d’une relecture originale de l’Utopie de Thomas More (1516) et des livres d’H.G.Wells (fin du XIXe siècle), réévaluant l’imagination, Elias interroge finalement notre rapport au « réel » et suggère de nouvelles catégories d’action. Un bol d’air frais en ces temps de réalisme « obligatoire » !
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