Cannabis, statu quo répressif
À la veille du rassemblement du « 18 joint », paraît le 2e volume d’une somme retraçant quarante ans de débat en France.
dans l’hebdo N° 1307 Acheter ce numéro
Alors qu’un vaste mouvement international de rupture avec la prohibition du cannabis s’amplifie, de l’Uruguay – où l’État a légalisé en 2013 la production, la distribution et la consommation – jusqu’à la vingtaine d’États des États-Unis, Colorado et Washington en tête, où l’usage récréatif (et non le seul usage médical) est désormais autorisé, la France reste à la traîne. Obstinément répressive. Certes, au début de l’année, le gouvernement a entrouvert (discrètement) la porte au cannabis thérapeutique, bénéfique notamment pour les malades de cancer ou de sclérose en plaques : le Sativex, spray à base de tetra-hydro-cannabinol (THC), a obtenu en janvier dernier une autorisation de mise sur le marché (AMM) en vue d’une commercialisation en 2015, de façon très restrictive. Mais tout changement de politique en France semble toujours aussi impensable – et scandaleux pour beaucoup.
Quand, en 1976, Libération publie le célèbre « Appel du 18 joint », les signataires sont nombreux et prestigieux : François Châtelet, Gilles Deleuze, Félix Guattari, Me Henri Leclerc, Edgar Morin, André Glucksman, Philippe Val, Bernard Kouchner, Philippe Sollers, Bertrand Tavernier… Combien d’entre eux le signeraient aujourd’hui ? De nos jours, si un ministre se demande s’il ne faudrait pas simplement réfléchir à une autre politique, il lui est intimé de se taire. Cécile Duflot et Vincent Peillon l’ont amèrement constaté. Et pourtant, avec l’une des politiques les plus répressives du monde occidental, la France compte plus de 6 millions d’usagers, au moins occasionnels, et la plus forte proportion de jeunes consommateurs d’Europe. Fondateur du Collectif d’information et de recherche cannabique (Circ), ancien candidat aux européennes sur la liste des Verts en 1999, Jean-Pierre Galland a repris en 1994 le flambeau de l’appel de Libé de 1976 en appelant à un rassemblement annuel pour tenter de rouvrir le débat. À l’occasion de sa vingtième édition [^2], on pourra se plonger dans le deuxième volume d’une somme très documentée [^3] dont Galland est l’auteur, qui retrace « 40 ans de malentendus », de revendications et de répression autour de cette plante dont l’usage est prohibé depuis la loi du 31 décembre 1970. À consommer sans modération.
[^2]: À Paris : le 18 juin à 18 h, à La Villette, www.circ-asso.net
[^3]: Cannabis, 40 ans de malentendus (1997-2002) , éd. Trouble-fête, 184 p., 30 euros.