Cannabis, statu quo répressif

À la veille du rassemblement du « 18 joint », paraît le 2e volume d’une somme retraçant quarante ans de débat en France.

Olivier Doubre  • 12 juin 2014 abonné·es
Cannabis, statu quo répressif
© Photo : JOEL SAGET / AFP

Alors qu’un vaste mouvement international de rupture avec la prohibition du cannabis s’amplifie, de l’Uruguay – où l’État a légalisé en 2013 la production, la distribution et la consommation – jusqu’à la vingtaine d’États des États-Unis, Colorado et Washington en tête, où l’usage récréatif (et non le seul usage médical) est désormais autorisé, la France reste à la traîne. Obstinément répressive. Certes, au début de l’année, le gouvernement a entrouvert (discrètement) la porte au cannabis thérapeutique, bénéfique notamment pour les malades de cancer ou de sclérose en plaques : le Sativex, spray à base de tetra-hydro-cannabinol (THC), a obtenu en janvier dernier une autorisation de mise sur le marché (AMM) en vue d’une commercialisation en 2015, de façon très restrictive. Mais tout changement de politique en France semble toujours aussi impensable – et scandaleux pour beaucoup.

Quand, en 1976, Libération publie le célèbre « Appel du 18 joint », les signataires sont nombreux et prestigieux : François Châtelet, Gilles Deleuze, Félix Guattari, Me Henri Leclerc, Edgar Morin, André Glucksman, Philippe Val, Bernard Kouchner, Philippe Sollers, Bertrand Tavernier… Combien d’entre eux le signeraient aujourd’hui ? De nos jours, si un ministre se demande s’il ne faudrait pas simplement réfléchir à une autre politique, il lui est intimé de se taire. Cécile Duflot et Vincent Peillon l’ont amèrement constaté. Et pourtant, avec l’une des politiques les plus répressives du monde occidental, la France compte plus de 6 millions d’usagers, au moins occasionnels, et la plus forte proportion de jeunes consommateurs d’Europe. Fondateur du Collectif d’information et de recherche cannabique (Circ), ancien candidat aux européennes sur la liste des Verts en 1999, Jean-Pierre Galland a repris en 1994 le flambeau de l’appel de Libé de 1976 en appelant à un rassemblement annuel pour tenter de rouvrir le débat. À l’occasion de sa vingtième édition [^2], on pourra se plonger dans le deuxième volume d’une somme très documentée [^3] dont Galland est l’auteur, qui retrace « 40 ans de malentendus », de revendications et de répression autour de cette plante dont l’usage est prohibé depuis la loi du 31 décembre 1970. À consommer sans modération.

[^2]: À Paris : le 18 juin à 18 h, à La Villette, www.circ-asso.net

[^3]: Cannabis, 40 ans de malentendus (1997-2002) , éd. Trouble-fête, 184 p., 30 euros.

Société Santé
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

« Aujourd’hui, le nouveau front, c’est d’aller faire communauté dans les territoires RN »
Entretien 22 novembre 2024 abonné·es

« Aujourd’hui, le nouveau front, c’est d’aller faire communauté dans les territoires RN »

Auteur de La Colère des quartiers populaires, le directeur de recherches au CNRS, Julien Talpin, revient sur la manière dont les habitants des quartiers populaires, et notamment de Roubaix, s’organisent, s’allient ou se confrontent à la gauche.
Par Hugo Boursier
Les personnes LGBT+, premières victimes de violences sexuelles
Étude 21 novembre 2024 abonné·es

Les personnes LGBT+, premières victimes de violences sexuelles

Une enquête de l’Inserm montre que de plus en plus de personnes s’éloignent de la norme hétérosexuelle, mais que les personnes LGBT+ sont surexposées aux violences sexuelles et que la transidentité est mal acceptée socialement.
Par Thomas Lefèvre
La santé, c’est (avant tout) celle des hommes !
Santé 21 novembre 2024 abonné·es

La santé, c’est (avant tout) celle des hommes !

Les stéréotypes sexistes, encore profondément ancrés dans la recherche et la pratique médicales, entraînent de mauvaises prises en charge et des retards de diagnostic. Les spécificités féminines sont trop souvent ignorées dans les essais cliniques, et les symptômes douloureux banalisés.
Par Thomas Lefèvre
La Confédération paysanne, au four et au moulin
Syndicat 19 novembre 2024 abonné·es

La Confédération paysanne, au four et au moulin

L’appel à la mobilisation nationale du 18 novembre lancé par la FNSEA contre le traité UE/Mercosur laisse l’impression d’une unité syndicale, qui n’est que de façade. La Confédération paysanne tente de tirer son épingle du jeu, par ses positionnements et ses actions.
Par Vanina Delmas