Réforme territoriale : Qui soutiendra les publics les plus fragiles ?
Une étude souligne les difficultés croissantes des départements à assumer leur principale compétence, l’action sociale, dont on ne sait à qui elle reviendra dans le futur schéma.
dans l’hebdo N° 1309 Acheter ce numéro
Depuis l’annonce de la suppression, à l’horizon 2020, des départements, l’interrogation, l’inquiétude même, est grande quant à l’avenir de l’action sociale, compétence majeure de ceux-ci. On l’a maintes fois rappelé, la réforme du mille-feuille territorial pèche par la méthode et surtout par son seul objectif avancé, purement comptable : « Faire des économies. » Ce déficit d’ambition se double surtout d’une omission méthodologique et organisationnelle de taille : quelles compétences pour les futures 14 grandes régions et les intercommunalités devant rassembler au minimum 20 000 habitants ? Il apparaît en effet plus qu’étrange que l’on ait d’emblée décidé d’un nouveau découpage régional et de la disparition du département, une collectivité vieille de plus de deux siècles, sans s’interroger sur la future répartition des compétences au sein de l’organisation territoriale à venir.
Or, le département, depuis les lois de décentralisation de 1982, s’est vu confier principalement les compétences de l’action sociale, en matière d’exclusion (avec le RMI, aujourd’hui le RSA), la protection de l’enfance et le soutien aux personnes dépendantes et handicapées. Une mission qu’il a su très bien remplir, comme le souligne une récente étude de l’Observatoire national de l’action sociale (Odas) [^2]. En trente ans, les collectivités départementales ont multiplié par trois l’effort en direction de ces publics en difficulté, pourtant eux aussi en augmentation. Elles ont surtout construit des administrations ad hoc, qu’il prendra du temps de remplacer.
Mais l’annonce de leur suppression est d’autant plus inquiétante que les départements rencontrent des difficultés croissantes – en dépit de leur bilan favorable – puisque le RSA pèse de plus en plus sur leurs budgets, alors que l’État baisse de son côté ses transferts financiers en leur direction. Ce qui les oblige à diminuer déjà leurs dépenses, en particulier celles destinées à la prévention. Et fait donc dire à l’Odas que le gouvernement, par ces choix budgétaires, semble déjà anticiper la disparition des actions de prévention, refusant de jouer l’avenir pour se limiter à un bilan comptable. Une politique à courte vue, sans qu’on sache quelle collectivité territoriale se verra confier ces compétences sociales, au cœur de l’action des départements.
[^2]: cf. www.odas.net