Une écotaxe au rabais

Avec son projet de « péage poids lourds », le gouvernement cherche le consensus… sans succès.

Lena Bjurström  • 26 juin 2014 abonné·es

Le « péage de transit poids lourds », version édulcorée de l’écotaxe concoctée par le gouvernement, ne satisfait personne. Ni les « bonnets rouges », ce mouvement de contestation breton qui avait obtenu la suspension de l’écotaxe fin 2013, ni les écologistes, qui accusent le gouvernement de proposer une « taxe au rabais » pour mieux acheter la paix sociale. Touchant 4 000 km de réseau routier, contre 15 000 dans le précédent projet, le nouveau dispositif épargne la plupart des routes bretonnes. Mais ce n’est toujours « pas le bon scénario », selon Christian Troadec, porte-parole des protestataires bretons. Le maire de Carhaix ne sera de toute façon satisfait que par la gratuité totale des routes de la région. Les critiques fusent, mais ne désarçonnent pas la ministre de l’Écologie, Ségolène Royal. « Quand j’entends ceux qui disent que ce n’est pas assez et d’autres qui disent que c’est trop, ça prouve que la solution retenue est une solution d’équilibre », a-t-elle déclaré sur France Inter, lundi. Visant un consensus politique, le nouveau dispositif risque en revanche de déséquilibrer les finances.

Considérablement réduit, le projet de péage – qui taxera les camions de plus de 3,5 tonnes au taux moyen de 13 centimes d’euro par kilomètre, modulable selon la distance et le niveau de pollution – ne rapportera pas les 800 millions d’euros escomptés, mais environ 500 millions. D’autant que la réduction de son champ d’application à 4 000 km de routes risque d’engendrer des « stratégies d’évitement » des péages, soulignait Matthieu Orphelin, porte-parole de la Fondation Nicolas-Hulot, dans Libération. « C’est un coup d’arrêt pour le financement de plusieurs dizaines de projets de transport en commun. À l’opposé de l’ambition affichée d’engager la France dans la transition énergétique. » Pour Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale d’Europe Écologie-Les Verts, cette « taxe a minima  » est très éloignée des ambitions du Grenelle de l’environnement. Même constat pour la députée Cécile Duflot, qui commentait dimanche sur Twitter : « Recettes en chute libre, report de la circulation… Tout faux. » Et si le gouvernement assure que le manque à gagner sera compensé par « d’autres ressources », celles-ci ne sont pas encore déterminées.

Écologie
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