Un mal français, le déclin de l’investissement ?
La situation est pire aux États-Unis, et toute la zone euro est touchée.
dans l’hebdo N° 1320 Acheter ce numéro
Les derniers chiffres publiés par l’Insee concernant l’investissement en France sont alarmants. Car le cours passé de l’investissement et sa situation actuelle commandent la tendance de l’emploi à plus long terme. Branle-bas de combat dans les rangs de la gauche de droite. L’Élysée réunit les assises de l’investissement. François Hollande, Emmanuel Macron et Michel Sapin sont sur le pont face à 250 responsables d’entreprises et de grandes banques. Le Medef, dont le moral est au beau fixe, multiplie des promesses qui feraient rire (un million d’emplois créés) si la situation n’était pas gravissime. « Mais il y a bien un prix à payer », on s’en doutait, celui des nouvelles concessions demandées aux classes populaires : temps de travail, salaire minimum… Tout y passe.
Le mal est-il grave ? La réponse est « oui ». Depuis les années 1980, à travers la succession des accélérations et des récessions du cycle conjoncturel, la tendance du taux d’investissement est clairement orientée à la baisse. Ce mal est-il spécifiquement français ? La réponse est « non ». La situation est pire aux États-Unis, mais il faut surtout savoir qu’elle affecte l’Europe dans sa globalité, et notamment la zone euro.
La courbe ci-dessous montre la part de l’investissement productif et en infrastructures (donc hors logement) dans le PIB des pays de la zone euro. On y observe le déclin graduel et un nouveau plongeon, en effet très inquiétant. On nous dira que l’Allemagne s’en tire mieux. Concernant l’ensemble de l’investissement, rien de tel n’apparaît dans les données. La vraie spécificité de ce pays est que la part des machines et des équipements dans le total est plus élevée qu’en France, ce qui correspond à la voie industrielle suivie par l’Allemagne, à l’opposé de la financiarisation à la française, à la Balladur et autres [^2]. Savoir que la France n’est pas seule n’est pas une consolation, mais cela en dit long sur l’origine de ce déclin. Au moins ceci : le modèle social français n’est pas seul en cause.
[^2]: Le pourcentage des machines et équipements dans le total est aujourd’hui de 60 % en Allemagne, contre 47 % en France.
Chaque semaine, nous donnons la parole à des économistes hétérodoxes dont nous partageons les constats… et les combats. Parce que, croyez-le ou non, d’autres politiques économiques sont possibles.