Bisphénol A : rien à craindre !
Le perturbateur endocrinien revient par la fenêtre européenne.
dans l’hebdo N° 1339 Acheter ce numéro
Quelques incertitudes sur les effets sanitaires potentiels, mais aucun risque pour la santé, y compris pour les femmes enceintes et leur bébé : l’Autorité européenne pour la sécurité des aliments (Efsa) a décidé de laisser en paix le bisphénol A. Étonnement et suspicion, en France en particulier, pays qui l’a interdit dans les biberons depuis 2010 et dans tous les contenants alimentaires depuis le 1er janvier – une première mondiale. Cette molécule, vedette de l’industrie des plastiques, est un perturbateur endocrinien reconnu dont les interactions avec le système hormonal peuvent déclencher des cancers et affecter les systèmes reproductif ou neuronal. Certes, mais l’exposition du public est trop faible pour justifier une alarme, écrivent en substance les auteurs. Pourtant, en 2013, l’Anses, l’équivalent de l’Efsa en France, avait inversement conclu à la nécessité de réduire les expositions.
La ministre de l’Écologie, Ségolène Royal, s’est ouvertement interrogée sur le « poids des lobbies » dans ce blanc-seing accordé au bisphénol A. En effet, Bruxelles est depuis des mois le siège d’un bras de fer intense quant à l’établissement d’une feuille de route pour limiter l’impact des perturbateurs endocriniens. Le processus est entravé faute de consensus sur le périmètre des molécules concernées : les industriels se battent farouchement pour dénaturer le texte, réclament toujours plus d’études complémentaires et divulguent des chiffres alarmistes sur le sinistre qui guette leur branche. Pourtant, près de mille études dans le monde font état de la toxicité du bisphénol A, rappelle le très sérieux Réseau santé environnement. Le Danemark et la Belgique ont, comme la France, imposé des restrictions sur son utilisation. Agacée du retard suspect pris par la Commission sur ce dossier, la Suède l’a même menacée de poursuites l’an dernier.