Budget : Un sursis sous conditions

La Commission européenne accorde à Paris un délai pour ramener son déficit dans les clous en contrepartie de promesses de réformes.

Michel Soudais  • 5 mars 2015 abonné·es

Jamais deux sans trois. Après un débat disputé en son sein, la Commission européenne a finalement accordé un nouveau délai de deux ans à la France pour ramener son déficit public sous la barre des 3 % de produit intérieur brut, soit jusqu’en 2017. C’est le troisième délai dont bénéficie notre pays pour ramener son déficit public dans les clous européens. Ce nouveau répit a hérissé plus d’un commissaire. À commencer par l’Allemand Gunther Oettinger, en charge de l’Économie numérique : « La crédibilité du pacte de stabilité est en jeu », a-t-il déclaré, déplorant que « la France ne soit pas encore là où elle doit être ». Le président de la Banque centrale allemande, Jens Weidmann, a également qualifié le déficit français d’ « inquiétant ». Le plafond de 3 % est tellement malmené, s’est-il plaint, que « les règles ne sont presque plus intelligibles, et leur application s’assimile aux pratiques du souk politique » .

Ce répit est toutefois assorti d’un nouveau tour de vis. Car si elle échappe dans l’immédiat à toute sanction, la France doit à la fois « redoubler d’efforts en matière budgétaire et sur le plan des réformes structurelles », a résumé le vice-président de la Commission chargé de l’euro, Valdis Dombrovskis. La Commission exige du gouvernement qu’il ramène son déficit public à 4 % en 2015 (au lieu des 4,1 % prévus par Paris), puis à 3,4 % en 2016 (à défaut des 3,6 % estimés) et enfin à 2,8 % pour 2017. Elle conteste également les plans soumis par la France, estimant qu’il reste encore à trouver 4 milliards d’euros d’économies en 2015. Enfin, Bruxelles attend aussi de la France qu’elle présente, dès avril, un programme national de réformes structurelles « ambitieux et détaillé ». « S’il advenait que  [ce] plan  […] n’était pas crédible, nous pourrions imposer un plan de réformes correctif », menace le commissaire européen Pierre Moscovici. Selon lui, les « incitations pressantes » de la Commission incluent la réforme du dialogue social engagée par Manuel Valls, ainsi qu’une réforme du « marché du travail », la loi Macron n’étant qu’ « un premier pas ». « Si des mesures supplémentaires sont nécessaires, nous les prendrons d’ici le milieu de l’année », a promis le ministre des Finances, Michel Sapin, qui espère trouver les 4 milliards d’euros manquants sans recourir à un collectif budgétaire. À quoi bon en effet demander l’avis du Parlement quand la décision vient de Bruxelles ?

Économie
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