Mélenchon-Buisson : Une liaison embarrassante
Deux journalistes du Monde suggèrent dans un livre une proximité entre Jean-Luc Mélenchon et Patrick Buisson. Éclaircissements.
dans l’hebdo N° 1346 Acheter ce numéro
Subliminal. « Qui est inférieur au seuil de la conscience », selon le Petit Robert. Curieux adjectif pour qualifier une alliance politique. C’est pourtant bien une « alliance subliminale » (comprenne qui pourra) qu’auraient scellée Jean-Luc Mélenchon et Patrick Buisson, l’influent conseiller de Sarkozy, lors de la dernière campagne présidentielle. La révélation, signée Ariane Chemin et Vanessa Schneider dans leur dernier livre, le Mauvais Génie (Fayard), a fait grand bruit la semaine dernière, s’étalant dans le Monde (où les auteures sont journalistes) ou sur France Inter. Et a déclenché l’ire de Mélenchon et de ses proches, qui y ont vu « pure invention » et « malveillance » .
À la lecture du chapitre consacré aux relations entre l’ex-candidat du Front de gauche et l’ancien journaliste à Minute reconverti dans le conseil en communication, force est de constater l’indigence de l’argumentaire. En quoi le fait que « Mélenchon réserve ses flèches les plus venimeuses à François Hollande et à Marine Le Pen » serait-il plus le résultat d’un « pacte » présumé que d’une stratégie 100 % mélenchonienne de s’imposer comme la seule alternative à Sarkozy ? De même, insinuer que Mélenchon aurait quitté le PS du seul fait que Buisson l’aurait convaincu « qu’il [avait] un espace à conquérir à gauche du PS » est non seulement absurde, mais ne prouve certainement pas que le second soit devenu le « conseiller occulte » du premier ! Reste une question : pourquoi diable le chantre de la pureté en politique s’est-il affiché, en 2007, à la remise de la Légion d’honneur de l’infréquentable Buisson ? Jeudi dernier, au micro de Bourdin, sur RMC, Mélenchon affirmait qu’il avait agi par « courtoisie » envers celui qui l’invitait un temps régulièrement à l’émission « Politiquement show » sur LCI. Venant d’un homme toujours prompt à rudoyer les journalistes (qu’il traite, sans trop faire de détail, de « petite cervelle » ou de « fachos » ), avouez que cela ne manque pas de sel… Mais de là à jeter le soupçon ?
Sans doute le monde politique est-il moins « pur » que ne le laisse entendre Mélenchon, qui prête du coup le flanc à la critique au moindre écart… Mais quelle que soit la proximité « physique » qu’il entretienne avec Buisson, le combat historique de Mélenchon contre l’extrême droite et son plaidoyer vibrant pour l’immigration pendant la campagne de 2012 le placent, sans l’ombre d’un soupçon, très loin des sombres idées du « mauvais génie ». N’est-ce pas là l’essentiel ?