Statistiques ethniques : Le poids des chiffres
Des statistiques ethniques permettraient de révéler certaines discriminations et de les corriger.
dans l’hebdo N° 1343 Acheter ce numéro
Tout le monde le sait : dans la « patrie des droits de l’homme », certains sont plus égaux que d’autres ! Nombre de ceux qui appartiennent aux minorités visibles ont une expérience quotidienne des discriminations au faciès. En se drapant dans une conception universaliste de la République « une et indivisible », les Français, majoritairement, ne cherchent pas à s’assurer de l’effectivité concrète de ses valeurs. En premier lieu celles inscrites au fronton des mairies et des écoles, « Liberté, égalité, fraternité ». Mais ce sont d’abord les élites politiques qui refusent la mise en place d’outils statistiques mesurant ce qu’il est convenu d’appeler la « diversité », celle des origines géographiques ou de l’appartenance confessionnelle, et les inégalités qui lui sont liées. Sans doute pour la simple raison qu’établir un diagnostic chiffré de ces discriminations appellerait des mesures correctives, affublées en français du drôle de nom de « discriminations positives » ( affirmative action, en anglais). Des mesures qui conduiraient ces élites à s’ouvrir et à se mélanger à d’autres populations…
L’État ne se donne donc pas les moyens de recenser les entorses aux grands principes qu’il ne cesse de proclamer. Alors que les chiffres de ladite diversité sont pour une bonne part connus, et qu’il a parfois mis en place des dispositions pour la promouvoir dans certains de ses services. Ce fut le cas lorsque Jean-Pierre Chevènement, au ministère de l’Intérieur, fit recruter davantage de Maghrébins ou de Noirs dans la police à la fin des années 1990. Aussi, inégalités de traitement et discriminations sont-elles relevées et comptabilisées par des acteurs privés. Apparues récemment, tournées par essence vers la défense d’un groupe particulier, des associations comme le Cran, la Brigade anti-négrophobie, le Collectif contre l’islamophobie en France ou l’Observatoire de l’antisémitisme produisent de telles statistiques et revendiquent leur production par les pouvoirs publics, Insee en tête. Ce qui leur vaut généralement d’être décriées par les associations historiques, qui se présentent comme « universalistes », mais au sein desquelles leurs membres ne se sentent pas toujours bien représentés.