Après Sivens : la liberté de manifester limitée ?

Des députés PS, UMP et UDI suggèrent de limiter la liberté de manifester, dans un rapport qui sera remis le 28 mai au président de l’Assemblée nationale.

Julia Gualtieri  • 21 mai 2015 abonnés
Après Sivens : la liberté de manifester limitée ?
© Photo: Altercation sur le site de Sivens entre opposants au barrage et forces de l'ordre, le 1er septembre 2014. AFP PHOTO / FLORINE GALEORN

Pour « mieux conjuguer ordre et liberté », rognons sur la liberté de manifester. La commission d’enquête parlementaire ouverte après la mort de Rémi Fraisse sur le site du barrage de Sivens (Tarn), n’a rien trouvé de mieux que de suggérer de limiter un droit fondamental.
Cette commission, qui a présenté ce jeudi 21 mai 23 propositions, envisage en effet de créer une interdiction administrative de manifester aux personnes susceptibles d’être violentes. Une idée déjà évoquée, ou plutôt suggérée, par le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve en février 2014, lors de son audition.

L’interdiction ressemblerait fortement à celle qui s’applique dans les stades à certains supporters. Noël Mamère (EELV), président de la commission, s’indigne : « Le droit d’assister à un match n’est pas une liberté fondamentale, contrairement à celui de manifester. »
L’écologiste n’a donc pas voté le rapport rédigé par Pascal Popelin, député socialiste de Seine-Saint-Denis et chaud partisan de Manuel Valls. Pas plus que la communiste Marie-George Buffet. Celui-ci a en revanche été approuvé par les élus PS, UMP et UDI, membres de la commission d’enquête.
Pour défendre cette proposition, la seconde du rapport, la commission fait valoir qu’il s’agit de régulariser une pratique existante. Le procureur de la République peut en effet sur réquisition écrite, autoriser les policiers à contrôler quelqu’un pour rechercher une ou plusieurs infractions précises.

Quant à la première proposition, elle est tout aussi sécuritaire. Elle conseille d’appliquer le dispositif qui permet aux juges d’énoncer une peine complémentaire d’interdiction de manifester en cas de condamnation pour des violences commises lors de troubles à l’ordre public. Pourquoi faire simple quand on peut multiplier les restrictions ?

D’autres suggestions, plus sensées, sont avancées. Notamment la présence des préfets sur les lieux des manifestations pour pouvoir « mesurer et adapter » leurs décisions ainsi qu’une meilleure formation au maintien de l’ordre. Dans la même logique, la commission propose de réserver ce type d’opération aux unités spécialisées et de limiter l’usage des Flashball mais pas celui des LDB40.

Une déception pour Noël Mamère qui espérait l’interdiction pure et simple de ces deux « lanceurs de balles de défense », comme elles sont définies. Avec l’Espagne qui se prépare à les interdire, la France est le seul pays européen à utiliser ces lanceurs, souligne Médiapart. Et préfère interdire des manifestants plutôt que ses armes, responsables du décès qui a fait naître la commission.

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